mardi 30 mai 2017

BELLES PAGES 18: LES GRANDS MOUVEMENTS HISTORIQUES DE LA JUSTICE PÉNALE

SOMMAIRE
I – 1808-1958 : 150 ANS DE GRANDES RÉFORMES
II – 1959 À AUJOURD’HUI : LA COMPLEXIFICATION DE LA JUSTICE PÉNALE
III – DIVERSES OPINIONS SUR LA JUSTICE PÉNALE
IV – LES COMMISSIONS DE RÉFLEXION ET LES PROPOSITIONS DE RÉFORMES

I – 1808-1958 :
150 ANS DE GRANDES RÉFORMES
Publié de 2000 à aujourd’hui

I. – De grandes réformes de la procédure pénale tous les 150 ans dans une ambiance de frénésie législative plus générale 

A) Le cycle des grandes réformes

On remarquera que les grandes réformes de notre procédure pénale ont lieu environ tous les 150 ans :
– un premier mouvement de grande ampleur s’est dessiné au xve siècle avec l’ordonnance de Louis XII en 1498 et celle de François Ier en 1539 (ordonnance de Villers-Cotterêts) ;
– la réforme la plus importante de l’Ancien Régime s’est produite au xviie siècle, avec l’ordonnance criminelle d’août 1670 de Louis XIV ;
– puis ce fut le Code d’instruction criminelle de 1808, modifié tout au long des xixe et xxe siècles et, 150 ans plus tard, le Code de procédure pénale de 1958 (applicable au 2 mars 1959) qui nous régit toujours, avec des modifications substantielles. À quand le prochain code ? En principe en 2100, si l’on respecte cet espacement !
Ce rythme s’explique sans doute par la maturité assez longue des questions à résoudre, dont les solutions n’apparaissent évidentes et, surtout, réalisables qu’à l’occasion d’époques de grands bouleversements, lorsque tout devient subitement possible.

B) L’ambiance frénétique des grandes réformes

 Que ce soit en 1808 ou en 1958, ces deux époques importantes pour la procédure pénale, ne le furent pas seulement pour cette matière.
        En 1808, c’est en amont qu’il faut rechercher et constater cette frénésie du législateur, en remontant à l’époque révolutionnaire. On rappellera, en amont du Code d’instruction criminelle, le Code civil de 1804 et celui de procédure civile de 1807. Pour comprendre cette frénésie, on se replongera dans l’époque révolutionnaire en relisant les objectifs de codification fixés dès août 1789 avec la détermination des principes fondamentaux par les organes délibérants (principes formulés en autant de questions distinctes), le travail de rédaction par des experts et le retour vers les organes délibérants pour discussion, le tout conduisant aux lois d’organisation judiciaire de 1791 et à un Code de procédure criminelle[1]. On soulignera et on appréciera à sa juste valeur cette rapidité dans un contexte d’époque troublée par les événements révolutionnaires, les guerres et sans les moyens modernes de travail (la plume d’oie n’avait pas encore été remplacée par le traitement de texte et la transmission électronique des fichiers numériques !). En vingt-huit mois, du 17 juin 1789 au 1er novembre 1791, l’œuvre était accomplie, les principes posés ; dans le Code de procédure criminelle élaboré par l’Assemblée constituante, le cautionnement pour la liberté provisoire était fixé par le juge, mais le juge était élu par le peuple, la règle de la publicité de la justice était instaurée, de même que la liberté du débat oral, le droit de se défendre, la communication de l’instruction écrite ; le jury était instauré dans tous les degrés de juridiction, pour l’accusation comme pour le jugement.
En 1958, c’est en aval que cette frénésie se manifeste, le Code de procédure pénale étant le premier texte important de ce qu’il faut bien appeler les grandes codifications de la Ve République, même si les textes nouveaux, en droit civil notamment, se sont intégrés aux anciens codes napoléoniens ou en ont été maintenus à l’écart, sans pour autant prendre la forme officielle d’un code (cf. la réforme du droit des procédures collectives). L’autre code important de la Ve République sera aussi un code de procédure, avec la promulgation en décembre 1975 du Nouveau Code de procédure civile (devenu par la suite, en janvier 2008, Code de procédure civile).
 II. – Trois hommes en 25 ans pour une réforme de la procédure pénale

 A) Trois commissions de 1930 à 1953

 a) La commission de Paul Matter (1930-1939). Le procureur général près la Cour de cassation, Paul Matter, se vit confier, en 1930, la présidence d’une commission pour réviser le Code pénal et le Code d’instruction criminelle. Pour ce dernier code un projet fut déposé par la commission Matter, en 1939, et fut oublié, en raison de la guerre, jusqu’à ce qu’il resurgisse sous le projet de la commission Donnedieu de Vabres.

b) La commission d’Henri Donnedieu de Vabres (1945-1949). La présidence de la commission instaurée à la Libération fut confiée à un magistrat, Henri Donnedieu de Vabres ; en réalité, cette commission n’élabora pas un projet de code nouveau, se contentant de reprendre, en l’actualisant, le projet de la commission présidée par Paul Matter. Curieusement (compte tenu des idées de l’époque à la Libération), ce dernier projet, déposé en 1949, était plutôt d’inspiration répressive[2], mais néanmoins très novateur et moderne sur un point.
Le répressif apparaissait dans trois dispositions : celle de la présence de l’avocat au côté de la personne soupçonnée qu’à partir du premier interrogatoire sur le fond ; celle du report du point de départ de la prescription de l’action publique au jour de la découverte de l’infraction ; enfin, celle qui facilitait grandement la couverture des causes de nullité de procédure.
À l’inverse, le juge d’instruction disparaissait en tant qu’organe chargé à la fois d’instruire et de prendre des décisions juridictionnelles. Certes, il était maintenu un juge de l’instruction, mais le changement de terminologie traduisait le changement de philosophie : ce juge, magistrat du siège, était en réalité un juge des libertés et du contrôle de l’instruction qu’il ne pouvait conduire lui-même ; il revenait au procureur de la République de poursuivre et d’instruire, selon les nouveaux pouvoirs que le projet concentrait sur sa tête ; en revanche, les décisions sur la mise en liberté, par exemple, relevaient de la compétence de ce nouveau juge de l’instruction. En somme, le glissement de vocabulaire traduisait le même mouvement que pour la procédure civile (mais, pour celle-ci, en sens inverse, dans le sens de l’accroissement des pouvoirs du juge) avec la création, en 1935 (D.-L. 30 oct.), du « juge chargé de suivre la procédure », puis le passage, en 1965 (D. 13 oct.), au « juge des mises en état » et, en 1971 (D. 9 sept.), au « juge de la mise en état ». Le projet, très critiqué, fut enterré et entra au musée des rapports mort-nés, encore que l’influence intellectuelle de ceux-ci ne doive pas être sous-estimée ; il leur arrive de survivre à un abandon législatif, l’esprit l’emportant sur l’inexistence d’une mise en œuvre parlementaire ; ils constituent le terreau de nouvelles nourritures intellectuelles.

c) La commission d’Antoine Besson (1953-1958). Une troisième commission fut donc instituée en 1953 et confiée à la présidence du procureur général de la Cour de cassation, Antoine Besson[3]. Cette commission est à l’origine directe du Code de procédure pénale de 1958, mais le résultat de ses travaux fut promulgué en trois fois avec une accélération au cours de l’année 1958, en raison du changement de République en octobre 1958 :
Au 31 décembre 1957, une première loi promulgua le titre préliminaire et le Livre I, votés par le Parlement à partir du texte de la commission ; mais l’entrée en vigueur de cette loi était différée ; à cette date, le livre II était aussi achevé par la commission, mais n’avait pas encore été soumis au Parlement. Il fut décidé d’accélérer le rythme de travail de la commission.
Douze mois plus tard, par une ordonnance n° 58-1296 du 23 décembre 1958, c’est (presque) l’ensemble du Code de procédure pénale qui était promulgué. Le gouvernement avait souhaité publier très rapidement un corpus législatif cohérent. Cette ordonnance promulgue donc non seulement les livres II à V, entre-temps rédigés par la commission, mais aussi le titre préliminaire et le Livre I de 1957, en leur apportant des retouches non substantielles, ce qui était d’autant plus aisé que le texte de 1957 n’était pas entré en vigueur.
Enfin, le Livre VI, contenant les dispositions propres aux départements d’outre-mer, ne fut promulgué que plus tard, pour une entrée en vigueur au 1er mars 1962.

II – 1959 À AUJOURD’HUI :
LA COMPLEXIFICATION
 DE LA JUSTICE PÉNALE

Errances et turbulences des modifications du code de 1958
Les années 1960, années d’exception. Ces années restent marquées par le drame de la guerre d’Algérie qui va perturber l’application du nouveau code[4] et qui inspirera une législation d’exception (V. Ord. 13 févr. et 4 juin 1960)[5].

Les années postérieures - Vue synthétique :
- La double décennie de 1970 à 1990 traduit une aspiration à de meilleures garanties des libertés individuelles dans un contexte d’accroissement de la délinquance et de répression accrue.
- La dernière décennie du xxe siècle (1990-1999) aura été l’occasion de grandes réformes idéologiques et de quelques lois marquantes sur la répression du terrorisme et les alternatives aux poursuites.
- L’an 2000 aura été une année charnière de refondation de la procédure pénale contenue dans la loi n° 2000-516 du 15 juin.
- Les années 2001-2009 resteront comme celles de l’importance croissante du thème de l’insécurité et du ministère de l’Intérieur dans les lois sur la Justice.
- Les années 2010 au 1er semestre 2014 : l’ambition dans l’annonce des réformes contrecarrée par le poids croissant des exigences constitutionnelles et européennes sur les projets déposés.

A) La double décennie de 1970 à 1990 : une aspiration à de meilleures garanties des libertés individuelles dans un contexte d’accroissement de la délinquance et de répression accrue
Passé la période d’exception, l’ordre étant revenu (on notera que les événements de mai 1968 n’ont pas engendré de réforme importante de la procédure pénale), les réformes, dans une société qui se modifiait considérablement avec des aspirations à plus de liberté, mais aussi des violences urbaines plus pesantes, vont être inspirées par ces deux traits.

a) D’un côté donc, la montée en puissance de la délinquance et de la violence (dont le film Orange mécanique de Stanley Kubrick, 1971, n’est que l’expression filmatographique à son paroxysme ; depuis on « a fait mieux » dans l’expression visuelle de la violence avec les films Kids, Seven[6] et L’appât[7]) et l’engorgement des juridictions qui en a résulté. L’esprit des lois nouvelles est donc simple, juger plus rapidement, d’où des procédures simplifiées et des lois de pure technique procédurale, sans porter un projet global, mais parfois redoutablement efficaces dans l’objectif de répression poursuivi. Ainsi, de la loi du 3 janvier 1972 sur la procédure d’ordonnance pénale et l’élargissement de la procédure d’amende forfaitaire. Ou de la loi du 29 décembre 1972 qui introduisait le juge unique devant les tribunaux correctionnels pour certaines infractions ; de la loi du 6 août 1975 élargissant la procédure de flagrant délit et minimisant les effets de la nullité d’une procédure ; de la loi du 2 février 1981 (loi dite Sécurité et Liberté, plus conceptualisée que les autres textes de l’époque, sans doute en raison de la présence de deux éminents professeurs de droit pénal, André Decocq et Jean-Claude Soyer, au sein de la commission chargée de la préparer) et de la loi du 9 septembre 1986 qui élargissent le domaine des procédures accélérées. La loi du 2 février 1981 sera très vite abrogée, pour l’essentiel, par la nouvelle majorité politique issue des élections de mai 1981.

b) Parallèlement, on note la montée en puissance de l’idée de protection des citoyens contre l’arbitraire des autorités de poursuite, d’instruction et de jugement. Contrairement à une idée (fausse) reçue, ce n’est pas exclusivement un pouvoir de gauche qui va être à l’origine de ces lois. Ainsi, la loi du 17 juillet 1970 qui s’appelait, intitulé significatif, « loi tendant à renforcer la garantie des droits individuels des citoyens » remplace la détention préventive par la détention provisoire ; ce n’était pas seulement un clin d’œil aux libertés, par un simple changement de terminologie ; c’était aussi la volonté de limiter la détention en la rendant plus exceptionnelle, d’où l’instauration d’une mesure nouvelle, le contrôle judiciaire ; mais l’intention du législateur fut dévoyée par certains juges d’instruction plus répressifs que d’autres qui imposèrent des contrôles judiciaires dans des hypothèses où la personne concernée aurait été laissée en liberté ; dans ce cas, il est clair que le contrôle judiciaire « mordait » sur la liberté et non pas sur la détention, ce qui n’était pas l’intention du législateur.
Il faut aussi citer à ce titre de la protection des libertés, mais sans en donner le détail, les lois du 6 août 1975, 10 juin 1983, 30 décembre 1985, 9 septembre 1986, 30 décembre 1987, 6 juillet 1989 qui, toutes, et le chiffre en est impressionnant ramené à la période (six en quatorze ans), vont réglementer les privations et restrictions de liberté avant jugement, réglementation qui apparaît ainsi comme le problème récurrent de cette période.

B) La dernière décennie du xxe siècle (1990-1999) : de grandes réformes idéologiques et quelques lois marquantes sur la répression du terrorisme et les alternatives aux poursuites
Il nous a paru utile d’indiquer ici les grandes lignes des lois de la période, dans une mise en perspective de l’évolution de notre procédure par rapport à la garantie des droits des citoyens.

a) Gauche-droite-gauche : une décennie marquée par l’idéologie
Cette décennie commence par la loi, très controversée, du 4 janvier 1993, sans doute parce qu’elle était très ambitieuse, qu’elle était chargée d’une forte idéologie « droits de l’homme », et intervenait dans un contexte politique de fin de règne, le pouvoir socialiste (second mandat présidentiel) étant au paroxysme de sa crise morale (les affaires se multipliaient) et politique (les élections législatives de mars 1993, deux mois plus tard donc, allaient être un désastre électoral pour la majorité sortante et tout remettre en question). Préparée par les travaux de la commission « Justice et droits de l’homme » présidée par un autre professeur de droit, elle aussi très au fait de la procédure pénale, Mme Mireille Delmas-Marty, elle visait à réformer profondément l’instruction, dans un sens très accusatoire ; très (trop ?) vite abrogée sur de nombreux points, en raison de l’alternance politique de mars 1993, il ne reste de cette loi, pour l’essentiel, que la possibilité d’un contact, pour la première fois, entre le gardé à vue et un avocat à partir de la vingtième heure, la suppression des pouvoirs de police judiciaire du préfet et des « privilèges » de juridiction des élus, des magistrats et de certains fonctionnaires, la substitution de la mise en examen à l’inculpation et l’accroissement de certains droits des mis en examen. En revanche, le retrait au juge d’instruction du droit de placer quelqu’un en détention provisoire, la suppression du droit pour le président du tribunal correctionnel de diriger les débats (il devait seulement veiller à leur bon déroulement), réformes autrement plus porteuses de modifications substantielles de notre procédure pénale, ont été abrogés par une loi du 24 août 1993.

b) La politique pénale de la majorité de droite jusqu’aux élections législatives du printemps 1997
En 1995, sous un Président de la République et un gouvernement de droite, deux lois doivent être signalées : celle n° 95-73 du 21 janvier, qui est une loi d’orientation et de programmation de la politique de sécurité publique sur cinq ans, de 1995 à 1999 (avec notamment la réglementation de la vidéosurveillance), mais aussi une loi qui affirme, pour la première fois, que le droit à la sécurité est un droit fondamental. Celle du 8 février 1995, qui présente la particularité d’être une loi commune à trois procédures, administrative, civile et pénale, instaure des audiences foraines, étend la possibilité du juge unique en matière correctionnelle et limite les cas de jugements par défaut ; le projet du gouvernement était plus ambitieux puisqu’il visait à introduire en France l’injonction pénale, alternative à l’emprisonnement, mais le Conseil constitutionnel l’a jugée non conforme à la présomption d’innocence et au rôle de gardien des libertés individuelles confié, par l’article 66 de la Constitution, à l’autorité judiciaire (déc. 2 févr. 1995) ; le projet sera repris et adopté en juin 1999, par la nouvelle majorité de gauche issue des urnes en 1997, mais cette fois en tenant compte des observations du Conseil constitutionnel.

L’année 1996 aura été marquée par des lois relatives à des domaines particuliers : L. n° 96-585, 1er juill., sur l’enfance délinquante, L. n° 96-647, 22 juill., et n° 96-1235, 30 déc., sur le terrorisme (avec une importante décision du Conseil constitutionnel le 16 juillet 1996 sur les perquisitions de nuit. Cette même loi concerne aussi la détention provisoire, le renforcement du contrôle de l’instruction par la chambre d’accusation et son président, la communication par l’avocat, à son client, des pièces d’une procédure d’instruction le concernant (CPP, art. 114) ; un peu de souplesse et davantage de respect des droits de la défense s’introduit ainsi dans cette phase capitale du procès pénal.

c) La politique pénale de la majorité de gauche à compter du printemps 1997

En 1997, on notera des réformes concernant  les contrôles effectués par la police judiciaire (L. n° 97-396, 24 avr.) et la compétence en matière de terrorisme (L. n° 97-1273, 29 déc.).

En 1998, peu d’activité législative à noter : loi n° 98-468 du 17 juin, sur le suivi socio-judiciaire et loi n° 98-1035 du 18 novembre, sur la police judiciaire.

En 1999, la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 tend à « renforcer l’efficacité de la procédure pénale », alors que l’essentiel de la loi est consacré (Chapitre 1er, art. 1er à 6) « aux alternatives aux poursuites et à la composition pénale ». Reprenant l’ensemble de la question de ces mesures alternatives, la loi crée la composition pénale qui s’insère dans un dispositif plus vaste d’évitement des poursuites, qui revêt plusieurs formes, mais qui suppose toujours, d’une part, l’accord de l’intéressé et, d’autre part, la « validation », par le président du TGI, de la mesure proposée par le procureur ; cette dernière exigence répond au souci du législateur de respecter la décision du Conseil constitutionnel du 2 février 1995[8] qu’un magistrat du siège, indépendant et impartial, intervienne dans la procédure qui conduit à une mesure qui, au final, apparaît comme une sanction pénale et suppose la reconnaissance, par l’auteur des faits, qu’il les a commis. Pour clore l’année, la loi n° 99-929 du 10 novembre réforme la justice militaire. Elle le sera à nouveau en 2006.

C) Une année charnière : l’an 2000. Une loi refondatrice de la procédure pénale
 L’année 2000 aura été marquée essentiellement par la très importante loi n° 2000-516 du 15 juin « renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes »[9]. Présentée par une garde des Sceaux de grande valeur (Élisabeth Guigou), rapportée à l’Assemblée nationale par une professeur de droit avertie (Christine Lazerges), elle fut néanmoins critiquée par certains, notamment par les farouches défenseurs du pouvoir quasi absolu du juge d’instruction, mais aussi par des magistrats soucieux d’avoir les moyens de l’appliquer dans de bonnes conditions ; elle ne mérite pourtant pas l’excès d’indignité dont on l’a parfois affublée dans la grande presse nationale. Fondamentalement, nous n’hésitons pas à l’écrire, c’est une bonne loi pour la protection des libertés, malgré quelques rares imperfections de forme (cf. la rédaction de l’article premier qui introduit un article préliminaire dans le CPP) ou de fond (V. le pouvoir résiduel du juge d’instruction de maintenir en détention provisoire celui qu’il renvoie devant la juridiction de jugement). Pour l’essentiel, cette loi a : modifié le régime de la garde à vue (avec un contact avec l’avocat dès la première heure) ; créé la catégorie, intermédiaire entre le témoin (simple) et le mis en examen, de témoin assisté ; dissocié les pouvoirs d’enquête dans l’instruction et de mise en détention provisoire avec la création du juge des libertés et de la détention ; autorisé les avocats et le parquet, au cours de l’audience de jugement, à interroger directement les témoins, les experts et les parties, sans passer par l’intermédiaire du président, mais sous réserve de son pouvoir de police de l’audience qui subsiste ; on s’oriente ainsi progressivement vers un système anglo-saxon de cross examination, puisque le témoin, par exemple, pourra être interrogé à tour de rôle par l’accusateur public et par la défense (ainsi que par l’avocat de la partie civile) ; introduit un appel des arrêts de cours d’assises ; juridictionnalisé l’exécution des peines ; créé une procédure de réexamen d’une décision pénale définitive suite à un arrêt de condamnation de la France par la Cour EDH ; modifié (en le rendant plus proche du justiciable) le régime de l’indemnisation de la détention provisoire et élargi l’indemnisation aux personnes non détenues mais bénéficiant d’un non-lieu, d’une relaxe ou d’un acquittement après une poursuite qui s’avère donc injustifiée. La simple énumération de ces réformes permet de juger de l’importance de cette loi.
Il faut en effet voir dans cette loi la préfiguration d’une réforme plus ambitieuse qui, un jour reprendra entièrement l’architecture du procès pénal, peut-être en s’inspirant de ce modèle européen qui se construit sous nos yeux. Bref, la France accède, par cette loi, aux standards européens.

b) On citera encore la loi n° 2000-1354, du 30 décembre qui modifie la procédure d’indemnisation des condamnés reconnus innocents, en l’alignant sur celle de l’indemnisation des personnes injustement mises en détention provisoire (que la loi du 15 juin 2000 avait modifiée).

D) Les années 2001-2009 : l’importance croissante du thème de l’insécurité et du ministère de l’Intérieur dans les lois sur la justice

a) L’année 2001 aura été une année plus calme sur le plan des lois votées, les grands projets étant abandonnés faute de consensus politique (car on est, politiquement, en période de cohabitation et à quelques mois de l’élection présidentielle de 2002. Cf. la réforme de l’action publique qui était liée à la réforme du Conseil supérieur de la magistrature. Les textes importants sont des textes d’application, par exemple décret n° 2001-71 du 29 janvier d’une part, sur les délégués et médiateurs du procureur de la République et, d’autre part, sur la composition pénale. On relèvera cependant la loi organique n° 2001-539 du 25 juin sur le statut des magistrats qui contient quelques dispositions intéressant la procédure pénale : limitation de la durée d’exercice de certaines fonctions, notamment comme juge d’instruction, juge des enfants ou juge de l’application des peines (dix ans) ; extension de la procédure de saisine pour avis de la Cour de cassation à la matière pénale ; instauration d’un processus de filtrage des pourvois.
Sous la pression des événements terroristes du 11 septembre 2001 à New York, la loi n° 2001-1062 du 15 novembre relative à la sécurité quotidienne[10], vite votée, commence dans son article 1er par reconnaître que « la sécurité est un droit fondamental », avant de prendre des mesures restrictives de la liberté (applicables jusqu’au 31 décembre 2003), comme quoi l’éternel débat de la conciliation de la sécurité et de la liberté est toujours d’actualité.

b) En 2002, le rythme va s’accélérer, avant, comme après l’élection présidentielle de mai, dont la campagne fut marquée par le thème de l’insécurité.
1) Avant l’élection présidentielle, mais dans ce contexte, la loi n° 2002-307 du 4 mars constitue une mini-réforme de la loi du 15 juin 2000, dans le sens d’un retour à un élargissement des pouvoirs des organes du procès pénal, au détriment de la protection des libertés des mis en cause, tant en ce qui concerne la garde à vue, que l’exécution d’une commission rogatoire délivrée par un juge d’instruction, ou encore, les moyens de nullité qui se révèlent au cours de l’instruction (ils doivent, pour tous les interrogatoires du mis en examen, être soulevés dans les six mois de cet interrogatoire, CPP, art. 173-1), la détention provisoire, l’appel du procureur général des arrêts d’acquittement de cours d’assises, dans tous les cas ; enfin, cette loi autorise désormais, sous certaines conditions, la publicité des débats devant la cour d’assises des mineurs et devant le tribunal pour enfants. Une autre loi du 4 mars 2002 (n° 2002-303) crée des juridictions spécialisées en matière sanitaire et des pôles de santé.
2) Après l’élection présidentielle d’avril/mai 2002, les lois dites « sécuritaires » vont s’enchaîner à un rythme soutenu, sans doute parce que la campagne électorale s’était déroulée sur le thème de l’insécurité C’est d’abord la loi n° 2002-1094 du 29 août « d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure », préparée par le ministère de l’Intérieur et non par celui de la Justice et dont seul l’article 5 concerne directement la procédure pénale. Le ministère de la Justice reprend la main avec la loi n° 2002-1138 du 9 septembre « d’orientation et de programmation pour la justice », dite encore loi Perben I, loi qui concerne toutes les justices, tant administrative, civile et pénale et qui, pour ces deux dernières, notamment, crée les juridictions de proximité, réforme les dispositions relatives à la composition pénale, à l’instruction et à la détention provisoire, au jugement des délits et des crimes, au droit pénal des mineurs, au fonctionnement et à la sécurité dans les établissements pénitentiaires et améliore l’aide aux victimes ; en outre, cette loi, forte de 69 articles, contient un titre premier de « programmation des moyens de la justice pour les années 2003 à 2007 » (art. 1er), moyens qui figurent dans un rapport annexé à la loi, rapport qui présente les objectifs pour améliorer l’efficacité de la justice, faciliter l’accès au juge et développer l’effectivité de la réponse pénale à la délinquance des majeurs et des mineurs ; mais ces dispositions n’ont pas de valeur normative).

c) L’année 2003 s’ouvre par le retour en force du ministère de l’Intérieur avec la loi n° 2003-239 du 18 mars « pour la sécurité intérieure », loi qui retiendra l’attention dans la mesure où elle introduit quelques dispositions nouvelles en matière de police judiciaire.

d) En 2004, le grand événement législatif aura été la loi n° 2004-204 du 9 mars portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, dite loi Perben II. C’est un monument législatif, comparable, de par son ampleur, aux lois n° 93-2 du 4 janvier 1993 et n° 2000-516 du 15 juin 2000 ; cette similitude explique sans doute les polémiques médiatiques dont la discussion du projet a fait l’objet.

Pour l’essentiel et techniquement parlant, cette loi s’oriente autour de la création d’une procédure spécifique, autonomisée, en matière de « délinquance et de criminalité organisées » (avec des juridictions spécialisées ; de l’insertion dans le Code de procédure pénale du mandat d’arrêt européen et de dispositions en matière d’entraide internationale, d’un renforcement de la lutte contre certaines infractions (en matière économique, financière et douanière, de santé publique, de terrorisme, de pollution maritime, d’incendies de forêts, de contrefaçon et de travail dissimulé, de discriminations et d’atteintes racistes, d’infractions sexuelles), de l’affirmation de la place du garde des Sceaux dans la conduite de l’action publique, de la mise en place de nouveaux outils au profit des enquêteurs, de la création d’un statut des repentis, d’un « plaider coupable » à la française (la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité) et d’un fichier des délinquants sexuels, de la refonte complète de la procédure par défaut (ex-contumace) en matière criminelle, de la substitution des « tribunaux de l’application des peines » aux juridictions régionales de la libération conditionnelle et des « chambres de l’application des peines des cours d’appel » à la juridiction nationale de la libération conditionnelle, juridictions qui avaient été créées par la loi du 15 juin 2000. La recherche de la preuve est désormais largement dérogatoire au droit commun, dès lors qu’on est dans le domaine de la « délinquance et la criminalité organisées », que ce soit en matière de garde à vue (avec la non-intervention de l’avocat dès la première heure, mais seulement à l’issue de la 48e heure, puis de la 72e heure, cette dernière règle constituant même le droit commun en matière de terrorisme et de trafic de drogue), de surveillance (extension des règles valables en matière de trafic de drogue), d’infiltration (extension de ce qui existait déjà en matière de trafic de drogue), de perquisitions de nuit (extension des règles déjà applicables en matière de terrorisme, de trafic de drogue et de proxénétisme), d’interceptions de correspondances émises par la voie des télécommunications (désormais possible – au-delà d’une instruction – en cas d’une enquête préliminaire ou de flagrance), de sonorisation et fixation d’images de certains lieux ou véhicules sans le consentement des intéressés, ou d’appel aux repentis. Le Conseil constitutionnel a pratiquement validé la totalité de ces nouvelles dispositions.

– Politiquement parlant, c’est une loi qui traduit un mouvement de fond de la procédure pénale, dans la continuité des lois des 15 novembre 2001, 4 mars et 9 septembre 2002, et qui ne touche pas seulement à certaines dispositions de la loi du 15 juin 2000 – que par ailleurs elle respecte sur de nombreux points – mais à l’ensemble du Code de procédure pénale et du Code pénal. Le mot d’ordre est l’efficacité de la réponse pénale aux troubles à l’ordre public et non pas l’amélioration des droits de la défense, même si ceux-ci se trouvent parfois renforcés (ainsi de la procédure par défaut en matière criminelle). L’articulation du rôle respectif des organes du procès pénal est revue principalement au profit de la police et du parquet, subsidiairement au profit du juge des libertés et de la détention, toujours au détriment du juge d’instruction (auquel échappent, par exemple, toutes les affaires traitées par la procédure de plaider coupable). Le ministère public est désormais le pivot de la procédure pénale, avec, en amont, des pouvoirs d’investigation accrus au détriment du juge d’instruction et, en aval, des pouvoirs nouveaux quant à une sorte de « négociation » de la peine qui « mordent » sur ceux du juge du siège ; au sein du parquet, le procureur est repris en main par le procureur général qui est chargé d’animer et de coordonner les politiques pénales. Et le ministre de la Justice conduit la politique de l’action publique déterminée par le gouvernement et veille à la cohérence de son application sur le territoire national, ce que le Conseil constitutionnel n’a pas jugé contraire à la conception française de la séparation des pouvoirs[11]. Le rôle du juge des libertés et de la détention se trouve renforcé par rapport au parquet, mais avec la banalisation de l’exercice de cette fonction, le magistrat l’occupant n’étant plus obligatoirement un vice-président de tribunal. La police se voit reconnaître des pouvoirs très importants en amont du procès pénal, pendant la phase d’enquête En revanche, le rôle de l’avocat est affirmé dans la procédure de plaider coupable et dans la nouvelle procédure de défaut en matière criminelle. Mais le juge juge de moins en moins, il valide et homologue. C’est une loi de politique pénale au sens plein du terme, avec comme mots d’ordre, la célérité et l’efficacité de la réponse pénale, exigences qui se concilient difficilement avec respect des principes de nécessité, de proportionnalité et des droits de la défense ; ceux-ci ressortent affaiblis puisque les garanties qui les caractérisent au niveau de l’instruction ne sont pas transposées au niveau des nouvelles enquêtes de police, alors même que ces enquêtes sont profondément transformées par la loi nouvelle, puisque l’enquête préliminaire devient une enquête de contrainte et non plus fondée sur le consentement et que l’enquête de flagrance voit sa durée maximale passer à seize jours ; bref, le parquet et la police vont utiliser des moyens judiciaires autrefois réservés aux magistrats du siège, sans que la personne mise en cause ne bénéficie d’un statut protecteur de ses droits. Une jurisprudence audacieuse pourrait d’ailleurs requalifier ces enquêtes en actes d’instruction, comme le décida jadis la Cour suprême américaine avec l’arrêt Miranda. D’une certaine manière, la loi du 9 mars 2004 est la suite logique de la loi du 21 janvier 1995 qui affirmait solennellement le « droit à la sécurité » comme un droit fondamental, avec le souci de protéger les citoyens contre l’insécurité, plus que contre l’arbitraire ; la sécurité est devenue une des conditions de l’exercice des libertés. Elle préfigure le débat autour de la suppression du juge d’instruction, ce qui pose immédiatement la question de la place du parquet.

– Conceptuellement parlant, c’est une loi déstabilisatrice, en ce sens que la catégorie des infractions n’a plus aucune unité procédurale ; ainsi de celle des délits qui se trouve éclatée entre la procédure classique, la comparution immédiate, les procédés alternatifs, le plaider coupable, sans oublier la procédure d’exception pour la délinquance organisée. Même remarque pour les crimes qui relèvent de tribunaux et de procédures différentes selon leur nature (criminalité organisée, terrorisme, trafic de drogue, même si la loi du 9 mars a entendu étendre les règles d’exception valant pour le terrorisme, le trafic de stupéfiants et le proxénétisme à toutes les infractions de délinquance organisée.

e) En 2005, plusieurs lois vont venir ajuster et compléter la loi du 9 mars 2004 :

1) La loi n° 2005-47 du 26 janvier 2005 modifie la compétence des tribunaux d’instance, des juridictions de proximité et des TGI, avec, notamment, la possibilité de faire appel aux juges de proximité pour composer le tribunal correctionnel (CPP, art. 398, al. 5) ; le Conseil constitutionnel a validé, sous certaines conditions, cette disposition.

2) Pour répondre (en contrepoint) à l’exigence, posée par la Cour de cassation[12] et le Conseil d’État[13], de la présence du ministère public à l’audience d’homologation de la solution proposée par le parquet et acceptée par le délinquant, la loi n° 2005-847 du 26 juillet « légalise » l’absence du procureur à cette audience, en rendant sa présence facultative (CPP, art. 495-9, al. 2) ; disposition validée par le Conseil constitutionnel le 22 juillet 2005. La même loi prévoit que cette audience est publique, ce que le Conseil constitutionnel avait préconisé dans sa décision du 2 mars 2004.


3) L’année 2005 se terminera par deux lois du 12 décembre :

– la plus importante (n° 2005-1549) est relative au traitement de la récidive des infractions pénales[14] ; sa principale innovation est l’institution du placement sous surveillance électronique mobile des détenus (le fameux « bracelet » électronique) dont, après expertise, on redoute qu’ils ne deviennent récidivistes quand ils seront libérés. Cette loi contient aussi des dispositions de procédure pénale, notamment quant à l’étendue de la saisine de la juridiction jugeant un récidiviste, quant au prononcé du jugement par le tribunal correctionnel et aux effets attachés aux meurtres et assassinats commis en état de récidive légale. Cette loi a été validée par le Conseil constitutionnel le 8 décembre 2005, tant par rapport à l’application immédiate du placement sous surveillance électronique, que dans sa disposition prévoyant la délivrance obligatoire d’un mandat de dépôt en cas de récidive de certaines infractions. En outre, pour répondre aux demandes des avocats, l’article 434-7-2 du Code pénal a été modifié pour protéger les relations entre les avocats et leurs clients.
– L’autre loi du 12 décembre, n° 2005-1550, relative à la défense, étend la compétence du juge unique pour les délits de port ou transport d’armes prévus à l’article L. 2339-9 du Code de la défense et englobe dans la catégorie « criminalité et délinquance organisées » les délits en matière d’armes et de produits explosifs commis en bande organisée prévus à certains articles du Code de la défense.

f) L’année 2006, parasitée par l’affaire d’Outreau et la proximité de l’élection présidentielle, n’a pas été très riche en lois consacrées principalement à la procédure pénale :

1) La loi n° 2006-24 du 23 janvier « relative à la lutte contre le terrorisme et portant diverses dispositions relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers », est une loi technique qui procède à des aménagements textuels et procéduraux, en visant à améliorer la prévention par la surveillance, le traitement des données et le contrôle, avec, en outre, l’aggravation des peines en cas d’association de malfaiteurs, l’extension du délit de non-justification de ressources et l’amélioration du sort des victimes[15].

2) La loi n° 2006-396 du 31 mars sur l’égalité des chances contient un article 51 relatif au pouvoir de transaction des maires en matière de contraventions que les agents de la police municipale sont habilités à constater (CPP, art. 44-1), disposition qui a donné lieu à des débats houleux, mais qui a été validée par le Conseil constitutionnel[16].

3) La loi n° 2006-399 du 4 avril instaure un dispositif de lutte contre les violences au sein des couples et les mariages forcés, complète le régime dérogatoire applicable à la poursuite des infractions commises contre des mineurs.

4) L’ordonnance n° 2006-637 du 1er juin porte refonte de la partie législative du Code de justice militaire ; validée (et complétée) par la loi n° 2007-289 du 5 mars, elle n’est entrée en vigueur que le 12 mai 2007. Pour l’essentiel, cette refonte vise à améliorer la clarté de la justice militaire en temps de guerre.

5) L’ordonnance n° 2006-673 du 8 juin porte réforme du Code de l’organisation judiciaire. La procédure pénale est peu touchée par son article 8 qui redéploie vers le Code de procédure pénale certaines dispositions et, en conséquence, d’une part, ajoute des alinéas aux articles 49, 398, 704 et 804, CPP et, d’autre part, crée les articles 137-1-1, 567-1-1 et 706-75-1, CPP. En revanche, les dispositions relatives aux juridictions pour les mineurs restent dans le Code de l’organisation judiciaire, mais sont renumérotées (art. L. 251-1 et s.). Partie réglementaire, D. n° 2008-522, 2 juin 2008.

g) L’année 2007 aura été autrement plus riche !

1) La loi constitutionnelle n° 2007-238 du 23 février refond le statut pénal du chef de l’État, en supprimant la Haute cour de justice pour créer une Haute cour (tout court) qui, en réalité, n’est plus une juridiction, mais le nom donné au Parlement réuni pour destituer le Président de la République.

2) La loi n° 2007-287 du 5 mars relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats, tire les enseignements de la terrible affaire d’Outreau. Pour l’essentiel, elle favorise le recrutement externe, c’est-à-dire hors des voies normales réservées aux étudiants sortant directement de l’université. En revanche, ses dispositions sur la mise en cause de la responsabilité disciplinaire des juges devant le Conseil supérieur de la magistrature ont été censurées par le Conseil constitutionnel le 1er mars 2007.

3) La loi n° 2007-291 du 5 mars tend à renforcer l’équilibre de la procédure pénale ; en réalité, elle porte de nombreuses dispositions, principalement dans le domaine de l’instruction (notamment la collégialité, dont l’application est sans cesse repoussée). Elle est directement issue des débats qui ont suivi l’affaire d’Outreau, même si elle est très en deçà des propositions émises notamment par la commission d’enquête parlementaire. Outre l’instruction préparatoire qu’elle rend plus contradictoire dans les expertises ordonnées et dans son règlement, elle modifie aussi le régime de la détention provisoire, les droits de la défense et réduit la portée du principe que le criminel tient le civil en l’état ; elle tend aussi à éviter les constitutions de partie civile abusives.

4) La loi n° 2007-297 du 5 mars relative à la prévention de la délinquance (avec un rôle accru des maires, acteurs de prévention) contient essentiellement des dispositions de procédure relatives aux mineurs, en modifiant l’ordonnance du 2 février 1945. Elle poursuit la recherche de l’équilibre entre prévention, éducation et répression. Surtout, elle définit une nouvelle sanction, la sanction-réparation.

5) La loi n° 2007-308 du 5 mars relative à la protection juridique des majeurs contient des dispositions de mise en conformité de notre procédure pénale avec la jurisprudence européenne et notamment la solution de l’arrêt Vaudelle du 30 janvier 2001.

6) La loi n° 2007-1198 du 10 août a été validée par le Conseil constitutionnel[17] à la fois quant aux peines minimales légales et quant à ses dispositions concernant les mineurs en état de deuxième récidive légale. La loi n° 2007-1545 du 30 octobre institue un contrôleur général des lieux de privation de liberté, nommé par décret du Président de la République pour six ans non renouvelables et qui, en tant qu’autorité indépendante, est chargé de « contrôler les conditions de prise en charge et de transfèrement des personnes privées de liberté, afin de s’assurer du respect de leurs droits fondamentaux ». Le décret n° 2007-1605 du 13 novembre crée le juge délégué aux victimes.

7) La loi n° 2007-1598 du 13 novembre relative à la lutte contre la corruption introduit quelques modifications relatives à l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement des infractions en matière économique et financière et de délinquance et de criminalité organisées. Le décret n° 2007-1620 du 15 novembre réglemente l’utilisation des nouvelles technologies (numérisation et visioconférence).

h) L’année 2008 s’oriente autour de deux axes : d’une part, la loi n° 2008-174 du 15 février, relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ; d’autre part, la loi n° 2008-644 du 1er juillet, qui crée de nouveaux droits pour les victimes.

i) Au titre de l’année 2009, la loi la plus importante est sans doute la loi pénitentiaire n° 2009-1436 du 24 novembre, qui marque une rupture avec le droit antérieur, essentiellement marqué par des dispositions d’ordre réglementaire ; son champ d’application est plus large que le strict droit pénitentiaire, avec des dispositions concernant la détention provisoire ; elle définit les droits et devoirs des détenus et met en place l’assignation à résidence judiciaire, avec surveillance électronique, qu’on peut définir comme la mesure qui oblige une personne mise en examen à demeurer à son domicile ou dans une résidence fixée par le juge d’instruction ou le juge des libertés et de la détention, et de ne s’en absenter qu’aux conditions et pour les motifs déterminés par ce magistrat (art. 71) ; son régime juridique participe à la fois du contrôle judiciaire et de la détention provisoire.

E) 2010-30 juin 2014. L’ambition dans l’annonce des réformes. – Le poids croissant des exigences constitutionnelles et européennes sur les projets déposés

a) L’année 2010 sous le signe annoncé, puis différé, d’un bouleversement de notre procédure pénale. Le début de l’année 2010 avait été marqué par l’importante loi n° 2010-1 du 4 janvier, sur la protection du secret des sources des journalistes. Citons aussi : la loi n° 2010-768 du 9 juillet visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale, la loi n° 2010-769 du 9 juillet sur les violences faites spécifiquement aux femmes et les violences au sein des couples et la loi n° 2010-930, 9 août portant adaptation du droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale.
Supprimer le juge d’instruction, telle fut la principale et quasi-unique occupation de la ministre de la Justice au cours du premier semestre 2010, serviteur zélée du chef de l’état, lequel, en mai 2010, changea de pied, ce qui conduisit à la ministre à enterrer l’ambitieux projet pourtant annoncé solennellement le 7 janvier 2009, par le Président lui-même à la Cour de cassation[18] ; il faut bien reconnaître qu’un discours volontariste ne suffisait pas, surtout lorsqu’il intervenait au beau milieu de la mission confiée à un groupe de travail, lequel ne rendait, sur le sujet, qu’une ébauche de propositions et que le groupe de travail technique constitué par la ministre (quatre députés, un universitaire, deux avocats) manquait cruellement de personnalités ayant un poids politique fort, une vision cohérente et globale de la question, une perception sensible de la matière et reposait, au final, sur la rédaction technicienne du projet par les services de la chancellerie, malgré l’apport intellectuel majeur d’un autre groupe de travail composé uniquement de professeurs de droit, mais comprenant au moins un membre hostile à la suppression du juge d’instruction (comprenne qui pourra !)[19]. La connaissance approfondie de la matière autre que livresque, la hauteur de vue et le recul nécessaires à la sérénité des débats, que seule une expérience concrète et vécue au quotidien de la procédure pénale permet d’acquérir, n’ont pas été au rendez-vous de l’Histoire, de ce qui aurait pu et dû constituer la réforme du siècle si l’on s’était donné les moyens politiques de la vouloir. Quel gâchis !

b) Pour 2011, l’année s’est ouverte par le vote de la loi n° 2011-13 du 5 janvier, sur la lutte contre la piraterie et l’exercice des pouvoirs de police de l’État en mer et poursuivie par la loi n° 2011-267 du 14 mars, portant « orientation et programmation pour la performance de la sécurité intérieure » (dite LOPSI II) ; cette loi comporte deux volets : l’un de droit pénal avec la lutte contre la cybercriminalité, l’institution d’un magistrat référent pour contrôler les fichiers (de police judiciaire) d’antécédents et d’analyse sérielle, la protection des intérêts fondamentaux de la nation (avec notamment la protection des sources et des collaborateurs des agents de renseignement, la possibilité pour des policiers spécialement habilités d’infiltrer, via les moyens de communication électronique, les groupes faisant l’apologie du terrorisme sur Internet), le renforcement de la lutte contre la criminalité, de la sécurité quotidienne et de la prévention de la délinquance ; un volet de droit public, avec la création d’une réserve civile de la police nationale, l’allègement des mesures de lutte contre l’insécurité routière, l’aménagement de la coopération entre l’État et les maires chargés d’animer la politique de prévention de la délinquance, ainsi que des règles relatives à la vidéosurveillance et à la vidéoprotection ; le Conseil constitutionnel a censuré 13 dispositions[20]. La réforme de la garde à vue, rendue obligatoire par une décision du Conseil constitutionnel pour le régime de droit commun et un arrêt de la Cour de cassation pour l’ensemble des régimes, est finalement intervenue deux mois et demi avant la date butoir fixée par ces deux juridictions (1er juill. 2011), par la loi n° 2011-392 du 14 avril, loi qui n’a pas été soumise au contrôle de conformité du Conseil constitutionnel (ce qui a laissé la porte ouverte à des QPC[21]). On citera aussi la loi n° 2011-525 du 17 mai, dite de simplification et d’amélioration de la qualité du droit qui contient des dispositions diverses et variées en matière de procédure pénale, la loi n° 2011-939 du 10 août sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs, loi qui modifiait sensiblement notre organisation judiciaire et notre conception de la justice pénale,  en expérimentant des citoyens assesseurs dans les tribunaux correctionnels, mais son application fut suspendue dès le 13 juin 2012, par un simple arrêté ; les autres dispositions concernaient la motivation des arrêts d’assises et le renvoi des mineurs de seize ans et récidivistes devant un tribunal correctionnel pour mineurs ; cette loi a été globalement validée par le Conseil constitutionnel, qui a jugé que « son orientation n’est pas, en elle-même, contraire à la Constitution. Celle-ci n’interdit pas que le pouvoir de statuer en matière de peines privatives de liberté soit exercé par une juridiction pénale au sein de laquelle siègent des citoyens assesseurs, sous la réserve que des garanties appropriées permettent de satisfaire au principe d’indépendance et de capacité »[22]. Deux lois de décembre ont terminé l’année 2011 : celle du 13 (n° 2011-1862), directement issue des travaux de la commission Guinchard, avec, en matière pénale : la création d’un pôle spécialisé à Paris pour connaître des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, de pôles spécialisés dans la connaissance des accidents collectifs ; l’extension du champ d’application des procédures pénales simplifiées (ordonnance pénale, comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ; amende forfaitaire pour les contraventions de 5e classe, procédure d’opposition au jugement rendu par défaut) ; règlement transactionnel pour les infractions aux réglementations relatives aux débits de boissons et au tabagisme. Celle du 26 ensuite, n° 2011-1940, qui instaure un service citoyen pour les mineurs délinquants (il s’agit de proposer un « contrat de service » aux mineurs de plus de seize ans, mais uniquement dans le cadre d’une composition pénale, d’un ajournement de peine ou d’un sursis avec mise à l’épreuve.

c) Pour 2012, deux périodes. Avant l’élection présidentielle, la loi n° 2012-409 du 27 mars est relative à la programmation en matière d’exécution des peines (art. 1 qui renvoie à l’annexe de la loi) mais contient aussi des dispositions normatives, notamment la possibilité d’ordonner la saisie des biens en valeur, la coordination des condamnations et peines prononcées à l’étranger avec le casier judiciaire et la transmission des informations vers les autres États de l’UE ; la loi transpose un certain nombre de décisions-cadre.
Après l’élection, le nouveau pouvoir issu des urnes s’est attaché essentiellement à détricoter les lois « sarkozistes », plus particulièrement en droit pénal général marqué, globalement, du sceau de l’infamie[23]. Publication d’une circulaire de politique pénale générale le 19 septembre et, le 29 novembre, d’une circulaire spécifique à la Corse. Arrêt de la participation des citoyens aux jugements des délits. La suppression des juridictions de proximité est reportée du 1er janvier 2013 au 1er janvier 2015 par la loi n° 2012-1441 du 24 décembre et la loi n° 2012-1432 du 21 décembre vient encore (un grand classique) revoir la sécurité et la lutte contre le terrorisme (pour sanctionner la pratique de citoyens français ou de personnes résidant en France qui participeraient à des camps d’entraînement terroristes à l’étranger

d) En 2013, la garde des Sceaux avait déclaré le 4 octobre 2012 que pour les réformes de la procédure pénale, il faudrait attendre que « la Justice se soit donné les moyens d’appliquer les dispositifs actuels » ; dans cette ligne politique, trois lois seulement ont été promulguées en 2013 et ont concerné :

 les attributions du Parquet : la loi n° 2013-669 du 25 juillet inscrit dans le Code de procédure pénale (art. 30) l’interdiction pour le ministre de la Justice d’adresser aux magistrats du parquet des instructions dans des affaires individuelles et lui confie la responsabilité de conduire la politique pénale déterminée par le Gouvernement et d’en préciser, par instructions générales, les grandes orientations pour assurer sa cohérence et son efficacité[24]. Décret d’application n° 2013-1134, 9 décembre[25].

 Diverses adaptations du droit de l’UE dans le domaine de la justice dans la loi n° 2013-711 du 5 août[26], avec notamment : transposition de la directive n° 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil, du 20 octobre 2010, relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales ; transposition de la décision-cadre n° 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009, renforçant les droits procéduraux des personnes et favorisant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions rendues en l’absence de la personne concernée lors du procès et aux décisions de confiscation de biens prononcées par une juridiction d’un État membre de l’UE (art. 713-20, CPP) ; transposition de la décision n° 2009/426/JAI du Conseil, du 16 décembre 2008, sur le renforcement d’Eurojust et modifiant la décision n° 2002/187/JAI instituant Eurojust afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité ; transposition de la décision-cadre n° 2008/909/JAI du Conseil, du 27 novembre 2008, concernant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements en matière pénale prononçant des peines ou des mesures privatives de liberté aux fins de leur exécution dans l’Union européenne (in CPP, art. 728-10 à 728-76 qui forment un nouveau chapitre 6 du Livre V, Titre II) ; adaptation de la législation française à l’accord entre l’UE, l’Islande et la Norvège relatif à la procédure de remise entre les États membres de l’UE et ces États, signé le 28 juin 2006, et à l’arrêt de la CJUE en date du 5 septembre 2012 ; adaptation de la législation française à la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, signée à Istanbul, le 11 mai 2011. Décret d’application n° 2013-958 du 25 octobre sur les modalités d’élaboration et de transmission des rapports de politique pénale et d’activité des parquets[27].

- Création, par loi organique n° 2013-1115 du 6 décembre et par loi n° 2013-1117 du même jour[28], d’un procureur de la République financier à compétence nationale en matière économique et financière. Six décrets d’application, n° 2014-64 à 69 du 29 janvier. La même loi n° 2013-1117 protège des représailles les lanceurs d’alerte contre les crimes et délits en entreprise (art. 35-I, in C. trav., art. L. 1132-3-3) et en administration (art. 35-II in art. L. n° 86-634 du 13 juillet, art. 6 ter A). Elle adapte aussi le droit français à la décision 2007/845/JAI du Conseil de l’UE du 6 décembre 2007.

- On y ajoutera le nouveau report, au 1er janvier 2015, de la collégialité de l’instruction par la loi n° 2013-1278 du 29 décembre, art. 129, soit huit ans après le vote de la loi du 5 mars 2007 (si aucun nouveau report n’est voté d’ici là).
Le projet sur la responsabilité juridictionnelle du Président de la République et du Gouvernement a été abandonné.

e) En 2014, la loi n° 2014-372 du 28 mars sur la géolocalisation insère un article 230-32 dans le CPP pour permettre le recours à cette technique si l’opération est exigée par les nécessités d’une enquête ou d’une instruction relative à un crime ou à un délit punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement pour les délits d’atteinte aux biens et de trois ans pour les délits d’atteinte aux personnes[29].
La loi n° 2014-535 du 27 mai transpose la directive du 22 mai 2012 relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales[30], à compter du 2 juin 2014[31]. Sujets concernés par sa transposition : droit à un interprète, droit de se taire, droit d’être informé en cas d’arrestation), notification des droits à toute personne soupçonnée d’une infraction qu’elle soit entendue librement ou gardée à vue, droit à un avocat en audition libre, par anticipation sur la transposition de la directive 2013/48/UE du 22 octobre 2013 ; applicable au 1er janvier 2015), accès au dossier aux assises), notification du droit à un interprète aux assises, accès au dossier et demandes d’investigation complémentaires en correctionnelle,  notification orale des droits à un interprète et de se taire en correctionnelle au début de l’audience, avec extension au tribunal de police et à la juridiction de proximité, droit à des actes d’investigation complémentaire en correctionnelle en cas de convocation par PV.

F) Du 1er juillet au 31 décembre 2014. La loi n° 2014-896 du 15 août « relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales » [32], contient une mesure emblématique, la contrainte pénale, mais aussi des dispositions générales sur la justice « restaurative », la finalité de cette justice[33], les droits des victimes, la possibilité de mettre en liberté pour motif médical une personne placée en détention provisoire (CPP, art. 147-1)[34] et des dispositions plus techniques de pure procédure pénale (transaction pénale, cour d’assises, contenu du jugement, notamment sur l’ajournement de la peine, qui seront vues à leur place[35].

La loi n° 2014-1353 du 13 novembre relative à la lutte contre le terrorisme[36], va au-delà de cette lutte, notamment en consacrant la dématérialisation des actes d’enquête et d’instruction même en dehors de ces procédures particulières.

G) L’année 2015 : l’explosion en vol des droits fondamentaux dans le contexte de la barbarie terroriste
Quatre lois retiennent l’attention :

- La loi n° 2015-177 du 16 février relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures a trait à la destruction des biens placés sous la main de justice, à la communication électronique et à la procédure d’amende forfaitaire.

La loi n° 2015-912 du 24 juillet sur le renseignement, au nom de la lutte antiterroriste, exclut le judiciaire du renseignement en définissant les missions des services de renseignement, ainsi que le régime d'autorisation et de contrôle concernant, notamment : l'accès aux données de connexion et les interceptions de sécurité ; le recours à des appareils permettant la localisation, la sonorisation de lieux et de véhicules, ainsi que la captation d'images et de données informatiques ; les interceptions de communications électroniques émises ou reçues à l'étranger ; le recueil par Tracfin, auprès des entreprises de transport ou des opérateurs de voyage et de séjour, des données identifiant leurs clients ou concernant les prestations qu'ils leur ont fournies. Cette loi contourne l’autorité judiciaire, en créant une nouvelle autorité administrative indépendante, la « Commission nationale de contrôle des techniques de renseignements », les recours étant portés devant le Conseil d’État[37] ; ce n’est qu’à la marge que la loi modifie le code de procédure pénale dans son article 19, notamment pour créer un fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes et pour soumettre à la compétence des juridictions anti-terroriste ceux qui, enregistrés dans ce fichier, manqueraient aux obligations qui leurs sont imposées[38]. Une requête contre cette loi a été déposée le 3 octobre 2015 par l’Association de la presse judiciaire devant la Cour EDH.

- La loi n° 2015- 993 du 17 août 2015 portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne[39] a pour objet la transposition de trois décisions-cadre du Conseil de l'UE et de deux directives du Parlement et du Conseil de l’UE : la décision-cadre n° 2008/947/JAI du 27 novembre 2008 sur l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux jugements et aux décisions de probation aux fins de la surveillance des mesures de probation et des peines de substitutions[40] ; celle n° 2009/829/JAI du 23 octobre 2009 sur l’application, entre les États membres de l’UE, du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions relatives à des mesures de contrôle en tant qu’alternative à la détention provisoire ; celle n° 2009/948/JAI du 30 novembre 2009 sur la prévention et le règlement des conflits en matière d’exercice de la compétence dans le cadre de la procédure pénale. Au titre des directives, celle n° 2011/99/UE du 13 décembre 2011 relative à la « décision de protection européenne » ; celle n° 2012/29/UE établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes[41]. En outre, un chapitre VI de la loi (article 11) porte des dispositions « diverses et de coordination » visant à étendre à de nouvelles infractions la compétence des juridictions spécialisées en matière de criminalité et de délinquance organisées (abrogation des 8° bis et 20° de l’article 706-73, CPP, création d’un article 706-73-1, CPP, modifications de l’article 706-74. Sur saisine de l’opposition, le Conseil constitutionnel a déclaré 26 des 39 articles de la loi contraires à la Constitution (un record et quelle honte pour ceux qui ont laissé ces cavaliers législatifs polluer la loi), outre l'article 12 relatif à l'exécution provisoire de l'emprisonnement dans le cadre de la contrainte pénale, dont il s'est saisi d'office. Le Conseil a jugé, le 13 août 2015 (n° 2015-719 DC que ces dispositions n'ayant pas pour objet de transposer une directive européenne, elles sont sans lien, « même indirect » avec le texte initial et partant, « adoptées selon une procédure contraire à la Constitution » ; en particulier, se trouvent censurés le dispositif de majoration d'amende dédié à l'aide aux victimes (art. 9), certaines dispositions favorisant le prononcé de mesures de probation et la possibilité de prononcer un sursis avec mise à l'épreuve en récidive légale (art. 15 à 21), ainsi que la disposition relative aux transmissions d'informations entre la Justice et les administrations concernant les infractions graves, notamment à caractère sexuel, commises à l'encontre de mineurs (art. 30).

- Sous la pression des dramatiques attentats terroristes du 7 janvier et du 13 novembre 2015, la loi n° 2015-1501 du 20 novembre est votée en extrême urgence pour réformer la législation de 1955 sur l’état d’urgence et confier au juge administratif le contrôle des décisions du ministre de l’intérieur et des préfets[42].

H) L’année 2016 : la poursuite de l’explosion en vol des droits fondamentaux dans le contexte de la barbarie terroriste
En 2016 :
a) La loi n° 2016-457 du 14 avril est relative à l’information de l’administration par l’autorité judiciaire pour protéger les mineurs d’actes délictueux commis sur eux par des tiers.

b) Surtout, un étrange chassé-croisé entre la droite et la gauche va se traduire dans la loi n° 2016-731 du 3 juin « renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale »[43], votée pour répondre au besoin de sécurité accrue des Français, en adaptant nos moyens juridiques à cette forme de criminalité et de barbarie, sans qu’il soit nécessaire de décréter l’état d’urgence[44]. Mais la loi va bien au-delà de la question du terrorisme et réalise ce dont l’ancien chef de l’État (2007-2012) avait sans doute rêvé, sans avoir pu (ou voulu) le concrétiser.

1) Pour ce qui est du terrorisme, les perquisitions de nuit dans les locaux d’habitation sont désormais possibles pendant une enquête préliminaire, s’il existe un risque d'atteinte à la vie, sur autorisation du JLD qui devra, outre les éléments de motivation déjà exigés à l’article 706-92, CPP, justifier de l’impossibilité de la réaliser pendant les heures légales habituelles de l’article 59, CPP (art. 706-90, nouvel alinéa, CPP). Toute personne dont le comportement paraîtrait lié à des activités terroristes pourra être retenue pour une durée de quatre heures, afin d'examiner sa situation (CPP, art. 78-3-1). La coopération dans la lutte contre le blanchement et le financement du terrorisme est également renforcée[45].

2) Pour ce qui est de la criminalité organisée au sens du CPP, art. 706-73 et 706-73-1, les sonorisations de locaux et les fixations d’images, jusque-là réservées à la phase de l’instruction, sont désormais autorisées durant l’enquête tant de flagrance que préliminaire, sur autorisation du JLD (CPP, art. 706-96). Toujours pour ce type de criminalité, de nouveaux actes d’investigation, gravement attentatoires à la vie privée, sont créés et seront mis en œuvre sur autorisation du JLD, voire du procureur de la République[46], durant l’enquête ou sur celle du juge d’instruction durant celle-ci : accès à distance aux correspondances électroniques accessibles au moyen d’un identifiant informatique (CPP, art. 706-95-1 s.)[47], recours aux IMSI-catchers[48], avec une durée variable selon l’objectif pour lequel ils sont utilisés (CPP, art. 706-95-4 s.)[49], accès à distance à des données stockées sur un système informatique (CPP, art. 706-102-1).
3) Pour toutes les affaires, au-delà de celles visées au Titre 1 de la loi et dans la finalité affichée de l’amélioration des garanties de la procédure pénale que porte l’intitulé de la loi, les apports sont faibles, voire illusoires ou incantatoires, même si deux évolutions majeures amorcent une mutation de notre modèle procédural[50] :

- La première de ces évolutions confirme le mouvement législatif amorcé par la loi n° 2014-535 du 27 mai[51], de renforcement du contradictoire lors de la phase d’enquête : par exemple, le nouvel article 61-3, CPP, étend l’intervention de l’avocat en garde à vue aux opérations de reconstitution de l'infraction et des séances d'identification des suspects ; ou encore le nouvel article 77-2, CPP, qui offre, sous de nombreuses conditions, à la personne mise en cause, à la victime ou à leurs avocats, la possibilité de demander d'accéder au dossier de la procédure et de formuler, auprès du procureur et dans un délai d'un mois, des observations ou des demandes d'actes utiles à la manifestation de la vérité ; ce nouvel article illustre aussi une seconde évolution majeure.

- La seconde évolution majeure, prenant acte du « dépérissement » de l’instruction au profit de l’enquête (en termes quantitatifs s’entend), aligne partiellement le régime de l’enquête préliminaire sur celui de l’instruction : cf. le nouvel article 39-3, CPP, qui énonce que « dans le cadre de ses attributions de direction de la police judiciaire, le procureur de la République peut adresser des instructions générales ou particulières aux enquêteurs » et « contrôle la légalité des moyens mis en œuvre par ces derniers, la proportionnalité des actes d'investigation au regard de la nature et de la gravité des faits, l'orientation donnée à l'enquête ainsi que la qualité de celle-ci » ; mais ce contrôle de proportionnalité qui ne se limite pas à la garde à vue (CPP, art. 41), est lui-même dépourvu d’un véritable contrôle juridictionnel en l’état actuel de la jurisprudence de la chambre criminelle[52]. Cf. encore, sur le modèle de l'article 81,CPP, relatif au rôle du juge d'instruction, le même article 39-3 qui ajoute que le procureur « veille à ce que les investigations tendent à la manifestation de la vérité et qu'elles soient accomplies à charge et à décharge, dans le respect des droits de la victime, du plaignant et de la personne suspectée » ; mais, là encore, il ne faut pas exagérer cette « avancée », car si l’impartialité du parquet dans ses fonctions de direction d’enquête, déjà affirmée à l’article 31, CPP, depuis la loi n° 2013-669 du 25 juillet, est une bonne chose, elle se heurte, au niveau des poursuites, à l’unité organique du parquet et à la conception européenne de l’impartialité de l’autorité judiciaire selon la jurisprudence Moulin de la Cour EDH, 23 novembre 2010).

- Au titre des nouvelles garanties, on notera : la clarification de plusieurs questions relatives aux délais d’une détention provisoire (CPP, art. 179, 186-4 et 574-1) ou à son contentieux (CPP, art. 199) ; la limitation de la durée des écoutes téléphoniques qui pouvaient être renouvelées indéfiniment par le juge d’instruction : elles sont désormais limitées à un an et à deux en matière de criminalité organisée (CPP, art. 100-2) ; l’encadrement des perquisitions dans les locaux d’une juridiction (CPP, art. 56-5) pour répondre aux inquiétudes nées de l’affaire dite Paul Bismuth[53] ; le défaut d'enregistrement sonore d'une audience de cour d'assises constituera, à compter du 1er septembre 2016, une cause de cassation de l'arrêt de condamnation s'il est établi que ce défaut « a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la personne condamnée » (CPP, art. 308, dernier alinéa) ;  la protection du témoin menacé est améliorée et, lors du jugement, le huis clos pourra être prononcé le temps de son audition si sa déposition publique est de nature à mettre gravement en danger sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches (CPP, art. 306-1).

- À l’inverse, dans une conception managériale du procès pénal, d’accélération de certaines phases du procès, la loi apporte des aménagements de simplification, souvent au détriment des garanties qu’elle souhaite renforcer par ailleurs[54] ! Par exemple, des obstacles à l’exercice du contradictoire, par la limitation des possibilités de demander des actes, d’exercer des recours (CPP, art. 82-3, dernier alinéa, 87, 2°, 186-3). Simplifications sans atteinte au contradictoire : par exemple, la possibilité offerte aux délégués et médiateurs du procureur de la République de procéder à des convocations en justice (CPP, art. 390-1).

4) La loi reprend les dispositions qui figuraient dans la loi n° 2015-993 du 17 août qui adaptait notre procédure pénale au droit de l’UE mais qui avaient été censurées par le Conseil constitutionnel au titre des cavaliers législatifs, notamment l’accroissement du délai dont dispose le juge de l’application des peines pour l’examen d’un aménagement de peine, l’acquittement d’une peine de jour-amende pour éviter l’incarcération, etc.

5) Au-delà de la procédure pénale, la loi consacre implicitement la confiscation des biens sans condamnation préalable (CP, art. 131-21, mod. par art. 84[55], augmente les contrôles administratifs et les pouvoirs de la police administrative : toute personne qui a quitté le territoire national pour rejoindre un théâtre d'opérations terroristes pourra faire l'objet d'un tel contrôle à son retour (CSI, art. L. 225-1) et cette personne pourra être astreinte, sur une période d'un mois, à demeurer à domicile ou dans un périmètre déterminé, et sur une période d'un an, de déclarer son domicile et tout changement de domicile. Aux fins de rechercher certaines infractions, la loi permet, outre les contrôles d’identité et les visites de véhicules, l’inspection visuelle et la fouille administrative des bagages, qui n’était jusque-là possible que dans le cadre d’une enquête (CPP, art. 78-2-2, § II, c[56]). Cette loi traduit le mouvement récurrent du balancier au profit des procureurs ou des préfets, dont il sera fait état plus loin.

6) Enfin, cette loi contient des dispositions sur l’application des peines, tant sur le fond qu’en droit du procès et que la loi n° 2016-987 du 21 juillet (qui prolonge l’état d’urgence), complète sur le volet pénitentiaire[57].

c)) La loi n° 2016-1524 du 14 novembre visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias a été censurée en son article 4 au sujet du secret des journalistes.

d) La loi n° 2016-1547 du 18 novembre de modernisation de la justice du XXIème siècle[58], impacte tous les types de contentieux, notamment pénal par : le rattachement des tribunaux de police aux TGI (art. 15-III, 3°) ; la confirmation de la suppression des juridictions de proximité (mais au 1er juillet 2017, art. 15-IV) et la suppression des missions des juges du même nom (même article), que la loi n° 2011-1862 du 13 décembre avait conservés mais que la loi organique n° 2016-1090 du 8 août avait « rayés » de la carte des juges non professionnels (art. 29-VII qui abroge les articles 41-17 à 41-24 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre) ; la suppression de la collégialité de l’instruction (art. 25) et des tribunaux correctionnels pour mineurs (art. 29) ; la création d’une procédure d’amende forfaitaire applicable à certains délits routiers (art. 35) ; on y ajoutera, à titre complémentaire du droit pénal, la création d’actions de groupe en matière de discrimination (art. 86 à 88), de questions environnementales (art. 89), de santé (art. 90) et de protection des données personnelles (art. 91 et 92). Le Conseil constitutionnel n’a censuré aucune des dispositions pénales de la loi, sous la remarque qu’il ne s’est prononcé que sur les dispositions dont il a été saisi et qui figurent dans sa décision, ce qui laisse la porte ouverte à des QPC sur les autres points[59].

Le besoin d’une pose
Toutes ces réformes, incessantes et complexes, posent la question d’une pause dans la refondation de notre procédure pénale ; peut-être vaudrait-il mieux se donner le temps de réfléchir et constituer une commission de réflexion sur l’ensemble du code pour lui redonner sa cohérence[60], rôle qui n’a malheureusement pas été joué par ladite commission Léger, qui a beaucoup déçu par le caractère allégé et parfois simpliste de ses propositions. Elles prouvent, en tout cas, que le point d’équilibre entre la procédure inquisitoire, largement obsolète, mais encore présente dans nos textes et notre pratique judiciaire, et la modernité d’une procédure accusatoire mal intégrée dans le code et la pratique, n’a pas encore été trouvé[61].
III – DIVERSES OPINIONS SUR LA JUSTICE PÉNALE


La nécessité d’une réforme : de quelques opinions critiques sur la justice pénale en France. La nécessité d’une réforme peut être appréciée par l’opinion qu’expriment ceux qui la pratiquent au quotidien, avocats ou magistrats ; parmi d’innombrables prises de position on retiendra celles-ci :

– Guy Danet, Discours de fin de mandat de président du CNB, lors de l’inauguration de la Maison du Barreau de Paris, le 12 juillet 1996, discours empreint d’une grande sérénité, d’une élégance digne de ce grand homme et qui provoqua une profonde émotion dans l’auditoire (en l’absence du président de la République, qui s’était désisté au dernier moment) et une standing ovation, aussi chaleureuse que spontanée : « Ayant décidé de mettre un terme définitif à mes activités représentatives de la profession qui n’ont que trop duré, je tenais, profitant une dernière fois d’une telle tribune, à vous dire deux choses, bien sûr à titre personnel ». [La première concerne la justice civile et le problème de la TVA] « Quant à notre justice pénale, j’estime qu’elle devient indigne de notre pays, terre présumée de liberté et de respect des droits de l’homme ; les motifs prévus et les conditions de mise en œuvre de la détention provisoire ne sont plus acceptables, la présomption d’innocence est devenue une notion creuse, vide de toute réalité et de toute signification ; quant au prétendu secret de l’instruction, il ne sert plus qu’à nuire à ceux qu’il était censé protéger. Des réformes, urgentes et radicales, sont indispensables ; et il ne s’agit pas, vous le savez bien, de choix politiques, de droite ou de gauche ; il s’agit seulement de rendre plus ouverte et plus accessible, plus chaleureuse et plus protectrice, une Justice que nous aimons et que nous souhaitons pouvoir continuer à respecter » (Gaz. Pal. 30 juill. 1996).

– J.-Cl. Bouvier, alors Secrétaire général du Syndicat de la magistrature (considéré comme étant « à gauche ») : « Nous continuerons à faire le procès de la justice pénale. Quelles que soient les catégories de citoyens visées : responsables politiques, chefs d’entreprise comme petits délinquants ! Car elle reste une justice inquisitoriale, face à laquelle les parties ne disposent pas d’armes égales. Et ce, à toutes les étapes de la procédure : enquête de la police judiciaire, détention provisoire, intervention des avocats, déroulement des procès, etc. C’est pourquoi nous souhaitons une véritable réforme de la procédure pénale, alternative au tout répressif actuel ».

- H.-C. Le Gall (Réflexions sur une recomposition du procès pénal in Mélanges R. Koering-Joulin, Nemesis et Anthemis éd., collec. Dr. et Justice, t. 110, 2014, p. 459) : « … notre procédure pénale est actuellement dans un état de délabrement lamentable qui m’a toujours fait renoncer à participer à des missions à l’étranger pour faire la promotion de notre système. Je ne veux pas être accusé de tromperie sur les qualités de la marchandise, voire d’escroquerie en bande organisée ».

IV – LES COMMISSIONS DE RÉFLEXION
ET LES PROPOSITIONS DE RÉFORMES

Propositions de Mme M.-L. Rassat (1995)

L’auteur du rapport proposait un nouveau Code de procédure pénale[62] :
– « de droit continental » (en contrepoint, sans doute, du rapport de Mme M. Delmas-Marty, qui avait été accusé, en son temps, d’être trop accusatoire, donc d’inspiration anglo-saxonne) ; d’où le maintien d’une phase d’instruction préparatoire confiée à un juge d’instruction « dont on s’efforce de favoriser l’efficacité, notamment au travers d’une nouvelle réglementation de la détention provisoire de nature à alléger les contraintes qui pèsent sur lui ». La direction des débats à l’audience de jugement était laissée à l’initiative du président de la juridiction (différence avec le projet de Mme Delmas-Marty, le président n’ayant plus qu’un rôle d’arbitre).

– Un code d’inspiration libérale « cherchant à aligner d’une façon quasiment parfaite les droits de l’accusation et ceux de la défense ». Avec, dans cet esprit, l’obligation de motiver les mesures d’administration judiciaire et non pas seulement les décisions juridictionnelles ; une théorie générale des preuves « qui en garantit la fiabilité et la loyauté » ; un encadrement des enquêtes de police ; une unification totale (traduisez le respect de l’égalité des armes) des droits des parties privées et du ministère public durant l’instruction préparatoire ; une détention provisoire laissée au juge d’instruction pour six mois maximum, le temps qu’il rassemble les preuves et une autre prononcée par un juge du siège « lorsque les besoins de la sécurité l’obligent », mais uniquement en cas d’infraction de violence ; l’instauration d’un « authentique » dossier de personnalité avec un volet médical, un volet psychologique, un volet psychiatrique en matière de crime et pour les délits de nature sexuelle concernant les mineurs.

– Un projet réaffirmant la nature de droit public de la procédure pénale, avec l’idée que la qualité objective de la justice pénale doit primer sur les intérêts particuliers.

Propositions de la Commission Truche (1997)

On retiendra essentiellement :
– Pour les relations parquet/Chancellerie : la définition par le gouvernement d’une « politique d’action publique », à la fois civile et pénale, élaborée en concertation avec les procureurs et donnant lieu à un rapport annuel du garde des Sceaux ; l’avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature pour la nomination des magistrats du parquet sur proposition du garde des Sceaux ; l’alignement des poursuites disciplinaires contre les magistrats du parquet sur celui du siège ; interdiction des instructions du ministre de la Justice aux procureurs dans des dossiers individuels, mais possibilité, pour le ministre, de dialoguer avec les procureurs sur ces dossiers et droit de saisine par le garde des Sceaux de toute juridiction et de présentation d’observations par l’entremise d’un magistrat de la Chancellerie et d’un avocat ; maintien du principe de l’opportunité des poursuites, mais les décisions prises par le parquet seraient motivées et notifiées aux personnes concernées ; recours contre les décisions de classement sans suite devant une commission ad hoc composée de trois magistrats issus des trois plus hautes juridictions, le filtrage étant assuré par le procureur général de la Cour de cassation ; compétence de cette commission pour contester un refus du parquet d’accorder un réquisitoire supplétif à un juge d’instruction ; modification de la formule du serment des magistrats pour respecter l’obligation du secret.

– Pour les relations police/justice : la nomination de magistrats de haut grade auprès des trois « grands » directeurs de la police, de la gendarmerie et des douanes, pour mieux contrôler les missions de police judiciaire de ces corps ; la direction du corps d’inspection des missions de police judiciaire par un magistrat.

– Pour « la garantie des droits des justiciables » (rubrique qui, par son existence même, montre le souci de la Commission de se placer dans une optique de respect des droits de l’homme) : intervention de l’avocat dès la première heure de la garde à vue ; extension du champ d’application de la présomption d’innocence prévue par l’article 9-1 du Code civil ; interdiction, pour les enquêteurs et pour la presse, de divulguer et de publier les noms des personnes gardées à vue ou mises en cause dans une enquête ; possibilité pour une personne mise en cause à la radio ou à la télévision d’obtenir un droit de réponse ; prohibition, pour la presse, de montrer l’image d’une personne menottée ou entravée et de publier des « sondages » sur la culpabilité de l’accusé (allusion à une triste affaire d’assassinat d’enfant dans laquelle un hebdomadaire eut le mauvais goût de demander à ses lecteurs de donner un tel avis, par Minitel) ; mise en détention provisoire, non plus par le magistrat instructeur, mais par un collège de magistrats auquel ne participe pas celui qui est chargé de l’instruction ; introduction de dates butoirs pour la détention provisoire ; instauration de « cellules de communication » pendant l’instruction (équivalent des « fenêtres » proposées par d’autres rapports), avec débats publics et contradictoires au moment de la mise en détention provisoire et de la contestation de certains actes d’instruction ; création d’un observatoire des situations litigieuses en matière de traitement médiatique de l’actualité judiciaire ; mise en chantier d’une nouvelle charte de liberté de la presse « mettant en application le principe tel qu’il est énoncé par la CEDH ».
Le double mérite de la Commission fut, d’une part, de n’envisager que des réformes réalistes, déjà mûres dans les esprits et, d’autre part, de mêler habilement les problèmes de statut des magistrats et de réformes techniques de la procédure pénale, avec une montée en puissance du judiciaire sur le policier, conformément d’ailleurs à l’article 66 de la Constitution. En revanche, on relève une certaine ambiguïté dans les mesures propres à régler la question des relations parquet/Chancellerie (pas d’instructions individuelles, mais…) ; l’esprit de compromis a sans doute régné au sein de la Commission. Le filtrage des recours par le procureur général près la Cour de cassation contre les décisions de classement sans suite paraît irréaliste, sauf à ce qu’il délègue ce pouvoir, compte tenu des contraintes d’emploi du temps de ce haut magistrat. Naïveté enfin dans la croyance que la modification de la formule du serment puisse améliorer le respect, par les magistrats, du secret ; outre qu’ils ne sont pas les seuls à le violer (mais sur ce point, le rapport a le mérite de ne pas cacher le problème), c’est davantage de déontologie qu’il faudrait, à l’ENM, dans les enseignements et dans la pratique quotidienne, vaste programme.

Propositions de la commission d’enquête parlementaire
sur l’affaire d’Outreau (A. Vallini et M. Houillon, 2006)

Suite à la lamentable affaire d’Outreau, une commission d’enquête fut créée par l’Assemblée nationale ; elle auditionna les acteurs de cette tragédie judiciaire et des experts, en vue, non seulement de repérer les dysfonctionnements de la justice, mais aussi de proposer des solutions d’amélioration de la justice pénale de notre pays. Ces propositions ont trouvé un aboutissement partiel dans les deux lois du 5 mars 2007 dont nous avons présenté les grandes lignes. Pour l’essentiel, la commission préconisait :

– de réformer le régime de la garde à vue : notifier les faits ; motiver les raisons plausibles de soupçonner que la personne à commis ou tenté de commettre une infraction ; enregistrer les interrogatoires pendant la garde à vue ; autoriser l’avocat à accéder au dossier lors de la prolongation de la garde à vue ; renforcer le contrôle du procureur sur les mesures et les locaux de garde à vue ;

– de rendre les enquêtes du parquet plus contradictoires : faciliter l’accès au dossier ; reconnaître à l’avocat le droit de présenter des observations et des demandes d’investigations complémentaires ; empêcher de fonder des poursuites sur des informations communiquées anonymement au procureur ;

– de limiter la détention provisoire : priorité à la liberté en limitant les durées maximales de détention provisoire, en justifiant de l’impossibilité de recourir à une mesure alternative, en précisant les critères du placement en détention et du maintien en détention et en limitant le recours à la notion d’ordre public ;

– de limiter l’exercice des fonctions judiciaires isolées : instituer une procédure contradictoire, ni accusatoire, ni inquisitoire ;

– de créer la collégialité de l’instruction : l’organiser et en définir les fonctions ;

– de refonder la chambre de l’instruction : garantir la stabilité de ses membres ; mieux respecter l’exercice des droits de la défense ; assurer la publicité de ses audiences ; conforter ses fonctions ;

– de garantir l’accès au dossier : accès direct au dossier de la personne mise en examen ; organiser la communication pour les personnes placées en détention provisoire ;

– d’améliorer la qualité des expertises : redéfinir le rôle des experts psychologues ; améliorer le statut des experts ; consolider les droits de la défense dans la procédure d’expertise ;

– de mieux protéger les intérêts des enfants : transmettre les informations et coordonner les différents acteurs concernés en cas de soupçons de maltraitance ; élargir les possibilités de saisine du juge des enfants ; améliorer l’information des services sociaux sur les recours possibles en cas de classement sans suite de leurs signalements ; assouplir l’obligation légale de recherche systématique de l’adhésion de la famille et du maintien du lien familial dans des cas extrêmes ; mieux articuler les rapports, le substitut chargé des mineurs et les magistrats chargés de l’instruction ; confier au défenseur des enfants le suivi des enfants des personnes placées en détention provisoire ;

– de redéfinir les conditions du recueil des déclarations des enfants : compléter la formation des assistants familiaux ; rendre obligatoires les enquêtes sur les circonstances de la révélation du mineur ; améliorer les conditions de recueil des déclarations des enfants ; supprimer les exceptions à l’obligation de procéder à l’enregistrement audiovisuel du mineur présumé victime ; mieux utiliser les enregistrements ; préciser le rôle des associations parties civiles ; généraliser la désignation d’avocats spécialisés dans la défense des mineurs ; prévoir l’assistance d’un avocat dès le début de l’enquête pour le mineur présumé victime d’une agression sexuelle ;

– de repenser la gestion des carrières des magistrats : favoriser des formations communes avec des avocats ; clarifier les fonctions du siège et du parquet ; instituer une gestion des ressources humaines ; favoriser l’émergence d’une magistrature plus ouverte sur l’extérieur ;

– de responsabiliser les magistrats : mieux prévenir les fautes ; mieux identifier les fautes ; sanctionner la méconnaissance manifeste des principes de la procédure civile et pénale : rénover le CSM ;

– de responsabiliser : améliorer les voies de droit existantes ; inciter les médias à élaborer un Code de déontologie ;

– de rendre compte de la politique pénale devant le Parlement ;

– de doter la justice de moyens dignes de sa mission.

Propositions de la commission Guinchard
 sur la réorganisation des contentieux (juin 2008)

État de leur traduction législative. Rapport remis à la garde des Sceaux le 30 juin 2008[63], avec 65 propositions, dont 18 en matière de procédure pénale. 51 ont été reprises en législation au 1er janvier 2017 (soit 80%), dont 12 sur 18 en matière pénale).

a) En matière d’organisation judiciaire :

n° 1, simplification de l’organisation judiciaire de première instance par intégration des juridictions de proximité dans les tribunaux d’instance avec maintien de la fonction de juge de proximité désormais placé auprès des présidents de TGI (reprise dans la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011, mais différée au 1er janvier 2015, puis 2017 par celles n° 2012-1441, 24 déc. 2012 et n° 2014-1654 du 29 décembre 2014, art. 99) ; finalement, les lois n° 2016-1090 du 8 août et n° 2016-1547 du 18 novembre suppriment et les juridictions et les juges de proximité.

n° 3 : création d’un pôle pénal au sein de chaque TGI : disparition des tribunaux de police et création d’une chambre du TGI compétente en matière contraventionnelle. Reprise par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre qui fait de ses juridictions une formation du TGI (art. 15-II).

b) En matière de compétence :

– N° 4 : extension des compétences de l’officier du ministère public aux contraventions de 5e classe (non reprise) ;

– N° 12 : dépénalisation de la diffamation à l’exception des diffamations présentant un caractère discriminant (raciste, sexiste…) (n° 12, al. 1er, non reprise[64]) ; un pôle civil « diffamation et injure » (dépénalisées) dans chaque TGI ; suppression de la compétence résiduelle du tribunal d’instance en la matière, par transfert au TGI (diffamation et injures non publiques) : n° 12, al. 2, reprise par D. n° 2009-1693, 29 déc. 2009 ;

– N° 18 : un pôle unique « crimes contre l’humanité, génocide » à Paris compétent pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre (reprise dans la loi précitée du 13 décembre 2011, art. 22) ;

– N° 19 : des pôles « grandes catastrophes en matière de transport ou grandes catastrophes liées à un risque technologique » : une juridiction spécialisée par cour d’appel, compétence concurrente entre la juridiction compétente en application des règles de droit commun et une juridiction spécialisée par cour d’appel ; à l’image des critères édictés pour la saisine des JIRS, elles pourraient être saisies en cas d’homicide ou de blessure involontaire lorsque les faits apparaissent d’une grande complexité, cette complexité pouvant être matérielle et découler par exemple de l’existence d’un grand nombre de victimes ; cette compétence concurrente préservera ainsi la possibilité d’opter en faveur d’une instruction menée en cosaisine au sein des pôles de l’instruction ; par ailleurs ces juridictions seraient dotées de manière pérenne d’une salle d’audience de taille importante dans laquelle se dérouleraient les procès liés aux catastrophes avec un nombre important de victimes ; proposition reprise par la loi précitée du 13 décembre 2011 (art. 23 à 25) ; le décret n° 2014-1634 du 26 décembre ne retient que deux TGI en tant que JIRS, Marseille et Paris.

– N° 20 : des pôles « droit de la mer », expression qui recouvre deux catégories de juridictions : d’abord, le regroupement du contentieux des délits maritimes (infractions au Code disciplinaire et pénal de la marine marchande devenu Loi du 17 décembre 1926 sur la répression en matière maritime) au sein de cinq tribunaux maritimes ; l’ordonnance n° 2012-1218, 2 nov. 2012 instaure ces tribunaux auprès de certains TGI déterminés par décret ; ensuite, les juridictions spécialisés dans certains contentieux liés à la mer, mais non disciplinaires : ce sont des juridictions du littoral maritime qui en connaîtront pour la pollution volontaire et accidentelle (loi du 13 décembre 2011 qui a ôter leur exclusivité aux juridictions parisiennes) et les atteintes aux biens culturels maritimes (loi n° 2016-1547 du 18 novembre, art. 27).

c) Allègement de procédures :

1) Développement de la transaction :

– N° 55 : Remplacement de la phase de l’amende forfaitaire non majorée par une indemnité transactionnelle pour les contraventions de première classe en matière de stationnement payant : ce projet s’inspire de ce qui est en place pour les contraventions en matière de transport collectif public, et notamment pour les amendes SNCF ou RATP, pour lesquelles la phase de l’amende forfaitaire est remplacée par une indemnité transactionnelle due à l’organisme victime de la contravention. Le propriétaire du véhicule serait redevable d’une redevance forfaitaire dont le montant serait fixé par arrêté du maire et dont la recette serait affectée au budget des collectivités locales. En l’absence de paiement, le recouvrement de l’amende forfaitaire majoré serait réalisé par le Trésor public. Proposition reprise par la loi n° 2014-58 du 27 janvier (art. 63-V), in CGCT, art. L. 2333-87, applicable au 1er janvier 2016 et qui crée une juridiction administrative spéciale pour connaître des recours.

– N° 56 : Instauration d’une phase transactionnelle : pour les contraventions de cinquième classe et, éventuellement, les délits en matière d’infractions à la police des services publics de transports terrestres ; pour les contraventions en matière de péage autoroutier. Reprise pour toutes les contraventions de 5e classe et les contraventions en matière de péage autoroutier, L. n° 2010-788, 12 juill. 2010, art. 58 et n° 2011-1862, 13 déc. 2011).

– N° 57 : Introduction de la transaction en droit pénal de l’urbanisme : permettre à l’administration de transiger, sous le contrôle du parquet, lorsque des infractions sont constatées en droit pénal de l’urbanisme. Non reprise. Mais la loi du 13 décembre 2011 développe le règlement transactionnel de certaines infractions relatives aux débits de boissons et au tabagisme (art. 30). Et celle n° 2014-896 du 15 août l’étend au droit de l’environnement.

– N° 58 : permettre la sanction d’infractions en matière de coordination des transports par le biais de mesures de transaction qui pourrait être assurée par des agents des Directions départementales de l’Équipement (DDE). La diversité des services effectuant les contrôles nécessite cependant de prévoir une procédure d’envoi centralisé des procès-verbaux aux DDE. Non reprise.

2) Développement des procédures pénales simplifiées :

– N° 59 : développement de la procédure d’amende forfaitaire : élargissement de la procédure d’amende forfaitaire à des contraventions des quatre premières classes actuellement non « forfaitisables » et aux contraventions de la cinquième classe (V. L. 13 déc. 2011, art. 29). Extension de l’exigence d’une consignation préalable en cas de contestation d’une amende forfaitaire (ensemble des contraventions du Code de la route et des contraventions forfaitisables) : sauf dispense légale, le contrevenant devra consigner le montant dû. Les cas de dispense légale sont élargis et adaptés selon le type de contravention. La loi n° 2016-1547 du 18 novembre, va plus loin en autorisant cette procédure pour certains délits, notamment routiers (art. 36).

– N° 60 : Amélioration de la procédure d’amende forfaitaire : faciliter le remboursement des consignations lorsque le réclamant bénéficie d’un classement sans suite ou d’une relaxe en améliorant son information et notamment en lui adressant un formulaire de demande de remboursement ; développer les procédures de télépaiement (auprès des buralistes ou des bureaux de poste par exemple) ou par timbre dématérialisé, avec des délais de paiement augmentés de quinze jours ; appliquer aux amendes forfaitaires majorées la diminution de 20 % de l’amende en cas de paiement volontaire dans le délai d’un mois, conformément aux dispositions de l’article 707-2, CPP. Reprise dans D. n° 2008-764, 30 juill. 2008.

– N° 61 : développement de l’ordonnance pénale délictuelle : extension de cette voie de poursuite à tous les délits quelle que soit la peine encourue (à l’exclusion, d’une part, des délits pour lesquels la loi ne permet pas une CRPC et, d’autre part, des délits du droit du travail ou des manquements aux règles d’hygiène et de sécurité entraînant des blessures involontaires ou des homicides involontaires). Proposition non reprise telle quelle : uniquement pour les délits relevant de la compétence à juge unique. Extension de cette voie de poursuite aux procédures comportant une demande de dommages et intérêts avec possibilité pour le juge de statuer sur cette demande : proposition reprise par la loi n° 2011-1862 du 13 décembre, art. 70 et 72. Élargissement des sanctions pouvant être prononcées : possibilité de prononcer une peine d’emprisonnement obligatoirement assortie du sursis d’un quantum maximum de trois mois. Cette peine devra être notifiée par délégué du procureur et le prévenu pourra disposer de l’aide juridictionnelle s’il désire être conseillé par un avocat sur l’opportunité d’une opposition (proposition reprise dans la loi du 13 décembre 2011, art. 29).

– N° 62 : élargissement du domaine d’application de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : élargissement de ces voies de poursuite à tous les délits (sauf les délits de presse, les homicides involontaires, les délits politiques et les délits dont la procédure de poursuite est prévue par une loi spéciale) quelle que soit la peine encourue (proposition reprise dans la loi précitée du 13 décembre 2011, art. 27). Les dispositions actuelles quant aux peines pouvant être prononcées en cas d’utilisation de cette voie de poursuite sont en revanche maintenues.

– N° 63 : élargissement du domaine d’application de la composition pénale : élargissement de cette voie de poursuite à tous les délits (sauf les délits de presse, les homicides involontaires, les délits politiques) quelle que soit la peine encourue. Les dispositions actuelles quant aux mesures pouvant être prononcées dans le cadre de cette procédure sont en revanche maintenues. Non reprise.

d) Le contentieux routier[65] :

N° 64 : meilleure coordination à l’échelle nationale entre les procureurs et les préfets afin d’harmoniser les décisions administratives et les décisions judiciaires de suspension du permis de conduire ; non reprise.

– N° 65 : instauration de dispositions particulières, limitées à titre expérimental aux infractions de conduite sous l’empire d’un état alcoolique, afin d’éviter des situations incohérentes en matière de suspension de permis de conduire : instauration d’un barème légal pour les suspensions administratives en fonction du taux d’alcoolémie. En cas de prononcé d’une suspension administrative, une décision judiciaire devrait intervenir dans le délai de la suspension. À défaut, il ne pourrait être prononcé à titre de peine une mesure de suspension d’une durée excédant celle de la suspension administrative. Non reprise[66]. La loi n° 2016-1547 du 18 novembre, va plus loin en autorisant la procédure d’amende forfaitaire pour certains délits, notamment routiers (art. 36).

Propositions de la commission Léger (sept. 2009)

Douze propositions ont été émises : transformer le juge d’instruction en juge de l’enquête et des libertés, investi exclusivement de fonctions juridictionnelles ; simplifier la phase préparatoire du procès pénal en instituant un cadre unique d’enquête et en donnant pleinement au ministère public le rôle de directeur d’enquête et d’autorité de poursuite ; instituer un juge de l’enquête et des libertés disposant de pouvoirs importants ; garantir et renforcer tout au long de l’enquête les droits du mis en cause et ceux de la victime ; renforcer le respect des droits et libertés individuelles dans la phase préparatoire au procès pénal ; simplifier et harmoniser la procédure préparatoire au procès pénal ; supprimer le secret de l’enquête et maintenir le secret professionnel. À ces sept premières propositions déjà contenues dans le rapport intermédiaire de mars 2009, le rapport final ajoute : faire du président de la juridiction de jugement un arbitre du débat judiciaire ; développer l’échevinage en matière correctionnelle ; renforcer les droits des parties civiles dans la phase de jugement ; moderniser la cour d’assises et améliorer les garanties entourant la procédure criminelle ; harmoniser les délais de procédure[67]. Le moins que l’on puisse dire que ce rapport est… léger, très léger ; peu d’argumentaires, une proposition phare connue dès le début des travaux de la commission (la suppression du juge d’instruction a été annoncée le 7 janvier 2009 par le Président de la République), sept propositions sur douze (les plus importantes et stratégiques) dévoilées en mars 2009, soit trois mois après le début des travaux, sans véritable travail de réflexion. Sur le fond, le rapport a encouru les plus vives critiques[68]. Les réflexions relatives à la phase préalable du procès sont vagues, imprécises et laissent de nombreuses questions sans réponses ; aucune proposition pour la phase exécutoire ; la réflexion sur le droit pénal qui était dans la mission du groupe de travail a été évacuée en raison « du travail considérable » qu’elle exigeait (sic) et parce qu’elle « exigeait d’avoir une vue d’ensemble pour étudier tous ses aspects (re-sic) ; des contradictions flagrantes : ainsi, il est reproché au juge d’instruction d’être tenu d’instruire « à charge et à décharge », mais la même obligation est reprise, mot pour mot, pour le procureur directeur d’enquête ! La question de l’aide juridictionnelle n’est pas traitée. Bref, un travail bâclé, sans apport conceptuel. Son avenir est lié au sort que le Parlement réservera à la disparition du juge d’instruction.

Rapport Nadal sur la modernisation de l’action publique (novembre 2013)

Le groupe de travail a formulé 67 propositions regroupées en 10 thèmes : garantir l’indépendance statutaire du ministère public ; inscrire l’action publique dans un cadre territorial élargi ; donner au ministère public des moyens à hauteur de son rôle ; redonner du sens et de la lisibilité à la politique pénale ; réaffirmer les missions essentielles du ministère public ; renforcer l’autorité du ministère public sur la police judiciaire ; repenser le traitement des enquêtes ; tendre à une plus grande maîtrise des frais de justice pénale ; moderniser l’organisation et le pilotage des parquets ; restaurer l’attractivité des fonctions de magistrat du parquet. Dans un communiqué du 10 février 2015, le ministère de la Justice a révélé, à propos de son plan d’action pour le ministère public, que vingt-deux propositions de ce rapport avaient été retenues, sans préciser lesquelles.

Rapport Marshall sur la Justice du xxie siècle :
les juridictions (décembre 2013)

Proposition 3.1. Le renforcement de la place du greffe. Au sein de la chaîne pénale, service de l’exécution inclus, une responsabilité plus directe doit être donnée au greffe. Une fonction de coordination technique doit être assurée sous la responsabilité d’un greffier en chef pour garantir la qualité de l’ensemble du processus procédural.

Proposition 9. Le tribunal pénal connaîtra (au sein d’un tribunal unique de première instance) de l’ensemble des procédures pénales mises en œuvre lors de la poursuite et du jugement des faits recevant une qualification délictuelle et contraventionnelle, et lors de la mise à exécution des peines prononcées dans ces procédures. Le traitement des procédures criminelles ne sera pas modifié. Ce tribunal sera composé des juges d’instruction, des juges des libertés et de la détention (devenus juges des libertés), des juges statuant en matière délictuelle et contraventionnelle et des juges de l’application des peines. Les juges des enfants, parties intégrantes du tribunal de l’enfance, seront associés aux politiques pénales de juridiction mises en place. – Une réflexion devra être engagée sur le traitement de certains contentieux, notamment en matière de sécurité routière, pour lesquelles des réponses diversifiées et ne reposant pas toutes sur l’intervention du juge existent et méritent d’être généralisées dans un souci de lisibilité et d’harmonisation. Le ministère public sera associé, dans son champ de compétence, à l’organisation du tribunal pénal avec le magistrat coordonnateur. La loi n° 2016-1547 du 18 novembre (art. 15-II) rattache le tribunal de police au TGI et non plus au TI.

Proposition 20. Les juges spécialisés (juges d’instance, désormais appelés juges de proximité, les juges des enfants, les juges d’instruction et les juges de l’application des peines) resteront nommés dans leurs fonctions par décret du Président de la République. Les juges des libertés et de la détention, devenus juges des libertés, resteront compétents pour statuer sur la situation des personnes mises en examen et des étrangers en situation irrégulière. Le contrôle des hospitalisations sous contrainte sera confié aux juges d’instance. Pour être pertinent, le service des juges des libertés et de la détention doit être assuré par des magistrats spécialisés, motivés et bénéficiant d’une réelle garantie d’indépendance et de pérennité dans l’exercice de leurs fonctions. L’expérience démontre que les magistrats qui se sont fortement investis dans ces fonctions sont souvent ceux qui se sont spécialisés dans cette fonction tout en exerçant à temps partiel d’autres activités juridictionnelles. La conciliation de ces objectifs conduit à prévoir que ces magistrats seront désignés pour une durée de deux années renouvelable deux fois, par le président du tribunal de première instance dans le cadre de son ordonnance de roulement. Ces fonctions ne pourront pas leur être retirées, sauf avec leur accord, avant l’expiration de la période de deux années en cours. Elles seront exercées, dans la mesure du possible, conjointement avec un autre service juridictionnel. Cette organisation mobilisant plusieurs magistrats serait de nature à permettre à terme l’organisation d’une collégialité des juges des libertés. La loi n° 2016-1547 du 18 novembre va plus loin : le JLD acquiert le statut d’un juge spécialisé par les modalités de sa nomination, son grade et la durée maximale de ses fonctions (10 ans).


Rapport Delmas-Goyon sur la Justice du xxie siècle : les juges (décembre 2013)

Proposition n° 5. Redonner corps au principe de l’opportunité des poursuites et renoncer à la systématisation de la réponse pénale pour permettre aux magistrats du ministère public de mieux adapter celle-ci aux situations locales (CPP, art. 39 à 44-1).

Proposition n° 6. Rationaliser le traitement de certaines infractions pénales : a) étendre le champ des amendes forfaitaires ; b) étendre le champ d’application des transactions administratives soumises à l’homologation du procureur de la République en donnant aux contrevenants la possibilité de se faire assister d’un conseil. La loi n° 2016-1547 du 18 novembre étend à certains délits (routiers) l’amende forfaitaire (art. 36).

Proposition n° 7. Redonner aux magistrats du siège et du parquet une vision globale et cohérente de l’action pénale de la juridiction par l’instauration d’une dynamique interne d’analyse et de concertation propre à la définition d’une véritable politique de juridiction.

Proposition n° 8. Généraliser, sans la rendre obligatoire, la tenue par le juge de l’application des peines de l’audience de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité afin de lier l’homologation de la peine et les modalités de son exécution, et d’alléger la prise en charge des dossiers par les services de l’application des peines (CPP, art. 495-9).

Proposition n° 9. Renommer « juge des libertés » le juge des libertés et de la détention et le reconnaître comme une juridiction à part entière. Non repris par la loi n° 2016-1547 qui confère à ce juge le statut d’un juge spécialisé.

Proposition n° 10. Organiser la fonction de juge des libertés selon une logique de service. Non repris.

Proposition n° 11. Reconnaître au juge des libertés une fonction de juge de l’enquête. Non repris.

Proposition n° 12. Donner au service du juge des libertés un droit d’accès permanent aux dossiers d’information dans lesquels des personnes mises en examen font l’objet de mesures privatives ou restrictives de liberté. Non repris.

Proposition n° 13. Faire préparer par des assistants de justice, à la demande du juge d’instruction ou du juge des libertés, des synthèses, établies selon un modèle-type afin de garantir leur objectivité, qui seront officiellement versées au dossier. Non repris.

Proposition n° 39. Généraliser des référentiels, pour les contentieux de masse et les litiges confrontant de manière réitérée le juge à des situations semblables, en matière civile, ainsi que pour les dommages-intérêts alloués en matière pénale. Ils devront être largement diffusés pour qu’ils soient accessibles au public.

Proposition n° 60. Donner un cadre réglementaire précis aux conditions de nomination, aux compétences et aux modalités de contrôle des délégués du procureur et développer la formation dispensée par l’ENM.

Rapport Beaume sur l’enquête pénale (juillet 2014)

Ce rapport[69] étudie notamment les modalités d’introduction du contradictoire dans ce type d’enquête. Les pistes d’amélioration proposées constituent davantage « un rapport de plus, pour ne pas avancer », comme l’a dénoncé le Barreau de Paris, qu’un « absolu changement » : limiter la durée des enquêtes préliminaires, ouvrir à l’avocat un droit d’accès limité aux pièces du dossier et ne pas généraliser la mise en état finale de l’enquête pénale sous la forme d’un débat contradictoire entre ministère public et défense devant un juge, au motif que cela entraînerait un allongement des procédures[70].


[1]V. O. Barrot, in Recueil général des lois, t. 1, 1839, p. XVI.
[2]On peut consulter le rapport du président et le texte du projet à la Rev. sc. crim. 1949, p. 433, 617 et 796. – Les discussions sur ce projet devant le Mouvement national judiciaire se trouvent à la Rev. sc. crim. 1949, p. 499 et 1950, p. 98. – Le projet a été commenté par Caleb : Rev. sc. crim. 1952, 19 et dans une thèse de doctorat, Paris, 1952, de Mme Arnal-Donnedieux de Vabres. Enfin, un parallèle très intéressant a été dressé entre ce projet et celui de la commission « Justice et droits de l’homme », par P. Couvrat, in Arch. phil. dr. 1991, t. 13, Sirey, p. 67.
[3]A. Besson, Esquisse d’une rénovation de notre procédure pénale : D. 1955, chron. 55.
[4]A. Vouin, L’application du Code de procédure pénale et les malheurs des temps : Rev. sc. crim. 1962, 65.
[5]A. Besson : D. 1960, chron. 161. – S. Thénault, Une drôle de justice : les magistrats pendant la guerre d’Algérie, La Découverte, L’espace de l’histoire, 2004, préf. J.-J. Becker, postface P. Vidal-Naquet.
[6]De D. Fincher, 1996, avec Brad Pitt, Morgan Freeman et Gwyneth Paltrow.
[7]De B. Tavernier, inspiré d’un fait divers, qui s’est répété en 2005 avec le « gang des barbares » (jugé en mai 2009 et sujet d’un film en avril 2014, d’Alexandre Arcady, « 24 jours, la vérité sur l’affaire Ilan Halimi, avec Zabou Breitman, Pascal Elbé et Jacques Gamblin).
[8] Déc. 2 févr. 1995, n° 95-350 DC, Injonction pénale : D. 1995, chron. Pradel, p. 171 et chron. Volff, p. 201 ; RFD const. 1995-22, p. 405, obs. Th. Renoux ; D. 1997, somm. comm. p. 130, obs. Th. Renoux.
[9]Sur l’élaboration de la loi : C. Lazerges, Histoire d’une navette parlementaire, in Arch. pol. crim. (Mél. Ph. Lafarge), 2000-22, Pedone, p. 53 et aussi in Rev. sc. crim. 2001-1, p. 7.

[10]Pour un premier aperçu, P. Jan : D. 2001, 3443. – M.-H. Gozzi : D. 2002, 4.
[11]Déc. 2 mars 2004, n° 2004-492 DC.
[12]Cass., avis, 18 avr. 2005 : D. 2005, 1200, note J. Pradel ; Rev. sc. crim. 2005, 592, obs. A. Giudicelli.
[13]Le ministère de la Justice ayant rédigé une circulaire du 19 avril 2005 pour préciser que la présence du ministère public n’était pas obligatoire à l’audience d’homologation, le Conseil d’État avait suspendu son application par deux ordonnances de référé du 11 mai 2005 : Rev. sc. crim. 2005, 592, obs. A. Giudicelli.
[14]Validée par déc. 8 déc. 2005, n° 2005-527 DC.
[15]Déc. 19 janv. 2006, n° 2006-532 DC.
[16]Déc. 30 mars 2006, n° 2006-535 DC.
[17]Déc. 9 août 2007, n° 2007-554 DC.
[18]H. Matsopoulou : JCP 2009, I, 156.
[19]Sur le rapport rédigé par ce groupe, V. Y. Gaudemet, présentation : JCP 2010, 553 et Gaz. Pal. 18 mai 2010, doctr.
[20]Déc. 10 mars 2011, n° 2011-625.
[21]Déc. 18 nov. 2011, nos 2011-191 et 194 à 197 QPC.
[22]Déc. 4 août 2011, n° 2011-635 DC.
[23]Th. Clay, Les lois du sarkozisme, O. Jacob éd., 2013.
[24] Commentaires : E. Bonis-Garçon et O. Décima, JCP 2013, 955. J.Buisson, Procédures, 2013, n° 293. E. Vergès, RSC 2013, 605.
[25] Aperçu : W. Roumier, Dr. pénal, 2014, Alerte 3.
[26] Commentaires : B. Lavielle, Gaz. Pal. 26 oct. 2013. A.-S. Chavent-Leclère, Procédures 2013, étude 11. E. Daoud, AJ Pénal 2013, 527. G. Beaussonie, RSC 2013, 861. N. Le Coz, AJ Pénal 2013, 523.
[27] Commentaires : B. Lavielle, Gaz. Pal. 23 nov. 2013. J. Buisson, Procédures 2013, 357.
[28] Commentaires : C. Cutajar JCP 2013, 1366,  AJPénal, 2013, 638 et RPDP 2013/4, 777,  J.-Cl. Zarka, D. 2013, 2582 ; Procédures 2014, n° 82, obs. Buisson ; E. Vergès, Rev. sc. crim. 2014, 143.
[29] Commentaires : E. Dupic, Gaz. Pal. 5 avr. 2014 ; Pradel, JCP 2014, 415.
[30] E. Allain, Réformes en cours : de l’enquête aux nouveaux droits de la défense, AJP 2014, 52.
[32] Décret d’application n° 2014-1582 du 23 décembre. Circulaire d’application n° 2014-17/E8 du 26 sept., BOMJ n° 2014-10 du 31 oct., JUSD1422849C.
[33] Sayons et Cario, AJ Pénal 2014, 461 ; Dassa et Le Deist, Gaz. Pal. 21 oct. 2014, n° 292-293.
[34] Belloir, Gaz. Pal. 21 oct. 2014, n° 292-294, p. 24.
[35] Commentaires d’ensemble : Pradel, JCP 2014, 952 ; Badinter et Beauvais, D. 2014, 1829 ; Robert, Dr. pénal, 2014, étude 16 ; Chavent-Leclère, Procédures 2014, étude 12 ; Giacopelli, AJ Pénal 2014, 448 ; Margaine, idem, 453 ; Herzog-Evans, idem, 456 ; dossier Gaz. Pal. 21 oct. 2014, n° 292-294. Commentaire sur les peines extensibles : Poncela, Rev. sc. crim. 2014/3, 611 ; Beaussonie, RSCrim. 2014/4, 809. Colloque Université de Strasbourg, 30 janv. 2015 Actes in Gaz. Pal. 23 mai 2015.
[36] Aperçu : Mauro, JCP 2014, 1203. Commentaires : Spinosi, JCP 2014, 1234 ; Dupic, Gaz. Pal. 27 nov. 2014 ; Rouidi, AJ Pénal 2014, 555 ; Godeberge et Daoud, AJ Pénal 2014, 563 (sur la liberté d’expression). Dossier Gaz. Pal. 24 fév. 2015, n° 55, dir. Dreyer.
[37] Décret d’application sur le contentieux, n° 2015-1211 du 1er octobre.
[38] Commentaires : JCP 2015, études : Robert, 956 ; Gozzi, 961 ; Verpeaux, 981 et  Parizot,1077. Desaulnay et Ollard, Dr. pénal, 2015, étude 17. Chavent-Leclère, Procédures, 2016, étude 1. Dossier Gaz. Pal. 26 janv. 2016, n° 4, p. 70
[39] Commentaires : Cahn, JCP 2015, 1018 ; Ribeyre, Dr. pénal 2015, étude 21 ; Vergès, Rev. sc. Crim. 2015, 683, n° 993..
[40] Sur cet aspect, Herzog-Evans, AJPénal 2015, 522.
[41] Sur cet aspect, Mésa, Les apports limités de la loi, Gaz. Pal. 2015, n° 315-318, p. 12.
[42] Commentaires : C. Haguenau-Moizard, D. 2016, 665 ; N. Roret, Gaz. Pal. 22 mars 2016, n°2, p. 13.
[43] Commentaires généraux (commentaires thématiques à la suite) : H. Matsopoulou, JCP 2016, 707. E. Dupic, Gaz. Pal. 14 juin 2016, n° 22, p. 12. Buisson, Procédures 2016, 239 ; Dr. pénal 2016, étude 17. O. Cahn, AJ Pénal 2016, 408. Avant la promulgation de la loi, J.-M. Pastor, AJDA 2016, 1037. M.-H. Ghozi, JCP 2016 738.
[44] Sur les enjeux du projet et une mise en perspective historique, Y. Mayaud, JCP 2016, doctr. 344.
[45] Commentaire : C. Cutajar, JCP 2016, 739.
[46] Cela concerne le recours aux IMSI-catchers, CPP, art. 706-95-4, § III : « En cas d'urgence résultant d'un risque imminent de dépérissement des preuves ou d'atteinte grave aux personnes ou aux biens, l'autorisation mentionnée aux I et II peut être délivrée par le procureur de la République ». Mais l’autorisation ainsi donnée devra être confirmée par le JLD dans les 24 heures.
[47] Durée limitée à 1 mois, renouvelable une fois durant l’enquête et à 2 mois, renouvelable jusqu’à 2 ans, durant l’instruction (CPP, art. 706-98).
[48] Ce dispositif permet de capter toutes les données et les correspondances transitant autour d’un appareil mobile utilisé.
[49] Si l’objectif est de recueillir les données techniques de connexion, 1 mois renouvelable 1 fois durant l’enquête (CPP, art. 706-95-4, § I) et 2 mois renouvelables jusqu’à 6 mois durant l’instruction (CPP, art. 706-95-5, § I). Si l’objectif est d’intercepter les correspondances émises ou reçues, autorisation donnée pour 48 heures, renouvelables une fois, qu’il s’agisse de l’enquête (CPP, art. 706-95-4, § II) ou de l’instruction (CPP, art. 706-95-4, § II).
[50] Commentaires des aspects de procédure pénale : E. Vergès, Rev. sc.crim ; 2016, 551 ; J.-B Perrier, D. 2016, 2134 ; dossier AJ Pénal 2016, 457.
[51] Loi de transposition de la directive 2012/13/UE du 22 mai 2012.
[52] Cass. crim. 18 nov. 2014, n° 14-81332.
[53] Cass. crim. 22 mars 2016, n° 15-83205.
[54] Commentaire : C. Fonteix, AJ Pénal 2016 460.
[55] Commentaire : G. Cotelle, AJ Pénal 2016, 463.
[56] Sur ce texte, G. Grécourt, Gaz. Pal. 26 juill. 2016, n° 28, p. 20.
[57] Commentaire : M. H. Evans, AJ Pénal 2016, 470.
[58] Commentaire : J.-B. Perrier, Dr. pénal 2017, étude 2.
[59] Déc. n° 2016-739 QPC du 17 novembre.
[60]En ce sens : V. J. Alix, Les hésitations de la politique criminelle : Rev. sc. crim. 2013, 677. – E. Alain, La justice a mal à sa procédure pénale : AJP 2013, 563. – V. Malabat, B. de Lamy et M. Giacopelli (ss dir.), Droit pénal : le temps des réformes, LexisNexis, coll. « Colloques et débats », 2011. – Ph. Bonfils, Faut-il changer notre procédure pénale ? : D. 2010, 158. – B. Bouloc, Faut-il réformer la procédure pénale ?, in Mél. Jeantet, LexisNexis, 2010. – G. Roujou de Boubée, Quelques propos sur les récentes réformes de la procédure pénale, recueillis par Justinien Le digeste, grand reporter à la Gazette des chambres criminelles, in Mél. Julien, Edilaix, 2003, 392.
[61]H.-Cl. Le Gall, La procédure pénale française : Bull. inf. C. cass. 15 mars 2003.
[62]Dalloz, coll. « Dalloz services », 1997.
[63]L’ambition raisonnée d’une justice apaisée, Doc. fr., août 2008.
[64]Vive polémique sur cette proposition, comme si la liberté de la presse n’était protégée que par le pénal, alors que les difficultés procédurales sont un obstacle à la réussite de l’action et sont invoquées à l’appui du respect de cette liberté ! V. N. Verly, Les écueils de la procédure de presse : AJP 2013/1, 12.
[65]S. Guinchard, L’impossible réforme du contentieux routier ? Entre velléités de déjudiciarisation et enjeux d’une politique publique de sécurité routière, in Mél. Lazerges, Dalloz, 2013.
[66] S. Guinchard, L’impossible réforme du contentieux routier ? Entre velléités de déjudiciarisation et enjeux d’une politique publique de sécurité routière, in Mél. Lazerges, Dalloz, 2014, 621.
[67]Commentaire : H. Matsopoulou : JCP 2009, aperçu rapide 156.
[68]Commentaires très critiques : R. Badinter : JCP 2009, entretien 235. – H. Matsopoulou : JCP 14 sept. 2009, n° 38, aperçu rapide n° 236. – Ch. Lazerges et alii : AJP oct. 2009, 385. – J. Pradel : Rev. pénit. 2009, p. 531 qui n’hésite pas à douter de l’utilité de ce groupe de travail (« la grande illusion »). – Sur la phase préparatoire du procès, A. Coche : D. 2009, 2765 (… ou les droits perdus du justiciable ?). – Sur l’octroi à la partie civile d’un droit de récusation des jurés d’assises, Fr. Desprez : Gaz. Pal. 26 nov. 2009, doctrine. – Sur l’ensemble des propositions concernant la cour d’assises, M. Huyette : D. 2009, 2437.
[69]http://www.justice.gouv.fr/publication/rap-beaume-2014.pdf : JCP 2014, 841. H. Matsopoulou, JCP 2014, 957
[70]Aperçu : E. Allain, D. 2014, 1547.

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